Interview de Paul Renaud au TGS 2017

Interview de Paul Renaud au TGS 2017

Paul Renaud est un illustrateur qu’on ne présente plus. Véritable ambassadeur de la Frââânce dans le pays de l’Oncle Sam chez Marvel, l’homme a un CV long comme le bras qui ferait pâlir d’envie n’importe quel dessinateur en herbe, puisqu’il a déjà travaillé sur de nombreuses licences comme Captain America, Star Wars ou bien The Avengers et j’en passe. Qui plus est, ce Toulousain d’origine participe chaque année depuis 2014 à l’organisation du Toulouse Game Show pour la section comics, et se plaît à inviter tous les ans des grosses pointures du genre. On a donc eu la chance de nous entretenir avec l’ami Paul Renaud pendant une dizaine de minutes, pour faire le point avec lui sur ce TGS 2017 avant aborder quelques éléments de sa carrière…


Vous avez travaillé avec Denis Bajram sur une couverture Collector spéciale TGS du premier numéro d’Avengers Universe. Comment ce projet a-t-il vu le jour ?

Ça faisait longtemps que je voulais travailler sur une telle exclusivité pour le TGS, donc j’en ai discuté avec le libraire partenaire, Gibert Joseph ainsi que Panini Comics. Tout le monde a répondu positivement quant à la mise en place de ce projet. A partir de là, il a fallu trouver un artiste intéressant en matière de mixité pour faire la couverture. Personnellement, je n’ai pas voulu la faire moi-même, car j’en fais déjà beaucoup, et il n’y aurait donc pas vraiment eu un côté exceptionnel.

J’ai donc pensé à quelqu’un de Franco-Belge pour pouvoir être en cohérence avec l’exposition de la French Touch de Marvel que nous avons cette année au TGS et qui est un poids lourd de la bande dessinée à la périphérie du comics : Denis Bajram. Tout le monde a approuvé ce choix très rapidement, et Marvel a aussi donné son accord pour que Denis travaille sur cette couverture Collector d’Avengers Universe #1. C’est la première fois qu’on fait ce genre de choses, et j’espère que ce ne sera pas la dernière !


Paul Renaud - TGS 2017 © MDCU (Crédit : Gregory Lerustre)

Récemment vous aviez déclaré sur votre compte Facebook que vous pensiez inviter des scénaristes de comics dans le cadre du TGS. C’est aujourd’hui chose faite avec Mark Waid. Vous pensez inviter d’autres scénaristes lors des prochaines éditions, voire même des coloristes ou des encreurs ?

Oui, c’est une très bonne idée… J’en avais par ailleurs parlé à Laura Martin qui est une coloriste avec laquelle j’ai déjà travaillé et qui a une grosse notoriété dans le monde du comics (elle a bossé sur Siege, sur pas mal d’events Marvel ainsi qu’avec des gens comme Olivier Coipel) pour essayer de mettre en place des ateliers pour présenter l’envers du décors de l’illustration. C’est un projet qui me tient à cœur ! En tout cas, je suis très content que pas mal de fans soient satisfaits de la venue de quelqu’un comme Mark Waid au TGS

Après de nombreuses années passées à travailler avec les Etats-Unis et chez Marvel notamment, quels sont les enseignements que vous en tirez par rapport à la France en ce qui concerne l’édition ? Qu’est-ce qui différencie indubitablement la France et les Etats-Unis en matière de comics ?

J’ai l’impression que les éditeurs américains sont beaucoup plus impliqués qu’en France, notamment dans les directions que prennent les histoires. Les éditeurs français travaillent souvent pour mettre en place un projet et une équipe artistique, puis ils laissent le projet suivre son cours. Aux Etats-Unis, l’équipe artistique est quotidiennement en contact avec les éditeurs pour faire un point quotidien sur l’avancée du travail et les décisions à prendre. Personnellement, je parle à mon éditeur tous les jours… Evidemment, le revers de la médaille c’est que ça réduit pas mal le travail de collaboration entre les scénaristes et les illustrateurs, car l’éditeur est l’interlocuteur principal de tout le monde. Cependant, le gros avantage, c’est qu’il a toutes les réponses à nos éventuelles questions. Et vu qu’on travaille sur des délais très courts, ça permet d’avoir des réponses rapidement et de travailler efficacement.

Il faut savoir que l’éditeur a tous les pouvoirs sur les titres : c’est lui qui choisit les artistes et les auteurs, c’est lui qui valide le script et qui coordonne tout. Le lectorat n’en a pas conscience mais l’éditeur a un rôle central dans la publication d’une série et c’est le principal interlocuteur de l’équipe créative. Dans le cas de certaines collaborations que je peux avoir avec des auteurs comme Mark Waid ou Rick Remender, notre relation de travail n’en pâtit pas, car on se connait très bien à la base.

Mais bon, pour répondre à la question, la différence fondamentale entre la France et les Etats-Unis c’est l’implication de l’éditeur. Quand je parle d’éditeur, je ne parle pas d’une entité (comme Marvel ou DC), mais d’une personne physique qui gère chaque série.

Suite à « l’affaire » X-Men Gold, est-ce que les instances dirigeantes de Marvel sont maintenant plus regardantes sur le travail des dessinateurs ?

Cette histoire a créé un petit précédent chez Marvel, et ça peut rendre les éditeurs plus suspicieux par rapport à ce qu’ils ne comprennent pas. Et dans le doute, ils peuvent demander aux artistes de supprimer un élément. Par exemple, s’il y a dans un dessin un graffiti sur un mur et l’éditeur ne comprend pas le graffiti, il va demander à l’artiste de l’enlever et ce, même si ce dernier lui donne une explication… Ça m’est personnellement arrivé, mais je comprends tout à fait le point de vue de l’éditeur qui préfère jouer la sécurité.


Paul Renaud - TGS 2017 © MDCU (Crédit : Gregory Lerustre)

Ici, on parle souvent de « French Touch ». C’est quelque-chose qui se ressent vraiment Outre-Atlantique ?

Non, pas réellement, car aux Etats-Unis, il n’y a pas cette notion d’appartenance à une écurie. En plus, quand on compare les illustrations d’artistes français, il y a des grosses différences stylistiques entre le travail d’Olivier Coipel, Bengal, Stéphanie Hans ou moi-même. J’ai l’impression que le style Français n’est pas tellement homogène, à la différence de celui des Italiens ou des Espagnols… Du coup, les Américains ne nous mettent pas sous l’étiquette « French Touch » parce que nous sommes simplement français ! (rires)

En règle générale, quelle est la réaction des fans quand vous reprenez un personnage ou une série en tant qu’illustrateur non-américain ?

En fait, les Américains sont plus regardants sur celui qui écrit le scénario que sur celui qui va l’illustrer. En effet, le dessin n’a pas la même « conséquence culturelle » qu’une histoire… De ce fait, il n’y a pas vraiment de réaction de la part des fans quand je commence à travailler sur tel ou tel personnage.

Les seuls petits problèmes que j’ai pu rencontrer par rapport à ma nationalité, c’était lorsque j’ai travaillé avec Nick Spencer sur Captain America. Nick a fait face à de nombreuses critiques lorsqu’il a parlé de l’extrême droite dans son scénario, ce qui lui a valu beaucoup d’ennemis. Et quand les gens sont contre vous, ils cherchent la faille. Et l’une des premières choses qui ont été dites à mon encontre, c’était que je n‘avais aucune légitimité à travailler sur Captain America, car j’étais Français… Mais rien de bien grave !

Suite à ses positions engagées, Mark Waid est souvent pris pour cible par des « haters » sur les réseaux sociaux. Vous y avez fait face, vous aussi ?

Ça m’est arrivé quelque fois, oui. Dernièrement, je me suis fait interpeller sur le net sur une chose étonnante que je n’avais pas vu venir : on m’a reproché de rendre Sam Wilson aussi héroïque que Steve Rogers ! (rires)

Pour en revenir avec Captain America , quel effet ça fait d’avoir dessiné le dernier numéro du run de Spencer qui a fait grand bruit dans l’univers du comics ?

C’était en effet une petite émotion pour moi, car ça faisait deux ans que je travaillais là-dessus. J’ai vu évoluer la chose au fil du temps, même si je n’étais pas tellement au courant de ce qu’il se passait, car le script intégral de Nick Spencer était secret. Par exemple, dans le numéro où Steve Rogers redevient jeune, je ne savais pas qu’il était un agent d’Hydra au moment où je l’ai dessiné ! J’aurais dû m’en douter au regard de certains éléments du scénario qui pouvaient le laisser entrevoir, mais j’avais attribué ça au fait que Steve venait de subir quelque chose de cosmique, et qu’il était désorienté…

Mais c’est vrai que c’était assez émouvant de terminer ce run, car c’était un véritable au revoir à Sam Wilson et ça m’a permis de dessiner le vrai retour de Steve Rogers avec son costume classique. C’était un beau numéro plutôt bien fait !

Que pensez-vous du départ de Brian Michael Bendis de Marvel pour DC ?

C’est un énorme évènement car Bendis était l’architecte de la maison Marvel, et même quand il n’était pas impliqué sur des séries, il était quand même là pour donner des conseils. C’était quelqu’un de très important pour Marvel, mais à titre personnel, je pense que c’est une très bonne chose qu’il change d’éditeur. Il va certainement apporter beaucoup de choses à DC, et Marvel va devoir réagir pour combler le trou. J’ai toujours trouvé ça bien que Frank Miller passait de Marvel à DC puis revenait... Ca a enrichi les deux éditeurs, c’était plutôt une bonne chose.

Mais bon, c’est vrai que Marvel doit serrer les fesses en ce moment ! (rires) Ceci étant, ils devaient savoir que Bendis allait partir, car les contrats se négocient très longtemps en avance. A partir de là, Marvel devait savoir au moins que Bendis ne souhaitait pas renouveler son contrat. Qui plus est, Tom Brevort est quand même très ami avec Bendis, donc je pense qu’ils ont dû en parler bien en amont….

Que peut-on attendre de Paul Renaud dans un futur proche ? Des nouvelles séries en perspective ? Des projets ? Allez-vous redessiner du Star Wars ?

Oui, je vais travailler sur Star Wars ! J’ai déjà fait quelques couvertures sur Captain Phasma, une série qui va bientôt sortir. D’ailleurs cette nuit, je me suis levé très tôt pour faire une couverture sur une nouvelle série qui raconte la genèse du personnage de Thrawn, l’amiral bleu qui a été créé par Timothy Zahn dans les romans dans l’univers étendu Star Wars, et qui a été réintroduit dans la série animée Star Wars Rebels. Marvel a récupéré le personnage pour faire une nouvelle série sur ses origines.

Je vais aussi travailler sur Black Panther. Je bosse sur une mini-série qu’on pourrait qualifier de Black Panther : Year One, qui raconte son accession au trône, sa rencontre avec Captain America en passant par son père, son grand-père, etc. On va donc passer au peigne fin tout le début de sa vie, sa rencontre avec The Avengers, les Fantastic Four

Je travaille aussi sur des couvertures de Wonder Woman sur un arc narratif, et j’espère continuer à y travailler dessus, car j’aime bien Wonder Woman !

Un grand merci à Paul Renaud ainsi qu’à Nicolas et tout le staff du TGS.

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