Top 10 Superman : 8 - Kryptonite

Top 10 Superman : 8 - Kryptonite

Certains auteurs adorent revenir sur le glorieux passé de nos héros en collants. C’est le cas de Darwyn Cooke (The New Frontier, Before Watchmen…) et de Tim Sale (The long Halloween, Daredevil :Yellow…). Ca n’a donc surpris personne de voir ces deux compères s’associer pour raconter un pan de la jeunesse de Superman dans une toute nouvelle série lancée pour l‘occasion : Superman Confidential. Ce titre n’a duré que 14 numéros, dont les six réalisés par notre duo qui forment arc revisitant la première rencontre entre l’homme d’acier et la célèbre kryptonite, son Talon d‘Achille.





Autant le dire tout de suite, l’intrigue n’est pas l’intérêt majeur de cette production. Clark Kent, dont la carrière de super-héros vient à peine de commencer, est chargé d’enquêter sur un richissime patron de casino. Or, il s’avère que le magnat des jeux de hasard possède un gros rocher de kryptonite, fragment de la planète natale de Superman dont les radiations peuvent le tuer. Cette trame assez classique est un prétexte pour explorer le côté humain de l’homme d’acier. Pas son identité civile mais ses faiblesses, ses craintes, toutes les failles qui le rendent semblable à nous autres. Et, de ce point de vue, le pari est réussi. Cooke a eu l’intelligence de situer son récit à une époque où Superman n’est pas tout-puissant mais un débutant en proie aux doutes. Ses exploits héroïques sont-ils compatibles avec une romance suivie ? Doit-il privilégier ses obligations auprès de ses proches et de son employeur ou sauver des vies ? Avec qui peut-il partager son fardeau ? Vous le voyez, la kryptonite est bien ici la dernière de ses peurs. Jeune adulte un peu gauche, il va apprendre à devenir un homme… et surtout à devenir humain. Nous l’accompagnons sur ce douloureux parcours, partageant ses souffrances et ses déchirements. Alors, paradoxalement, nous tremblons plus pour lui quand il est confronté à Loïs que lorsqu’il est exposé à la kryptonite. Si Richard Donner et Christopher Reeves ont montré qu’un homme pouvait voler, Darwin Cooke a montré qu’un homme qui volait restait un homme. Un homme capable de nous émouvoir. Et pour cela, on ne lui tiendra pas rigueur des quelques faiblesses de son histoire.





Il faut dire que le trait envoûtant de Tim Sale nous ferait oublier bien des égarements scénaristiques, tant il empreint de magie ce qu’il dessine. Devant ce succès artistique, on en oublie que Tim Sale jouait gros en revenant sur le personnage, risquant la redite et la comparaison son remarquable Superman For All Seasons, une de ses plus belles prouesses. Il a donc décider de s’éloigner de sa précédente œuvre, en épurant son style, en modifiant légèrement les traits de son Superman et en recourant davantage au noir et aux ombres. Plutôt que de décrire le style si reconnaissable de Tim Sale, attardons-nous sur quelques temps forts graphiques de cet arc. Dans le premier épisode, avec un sens de la mise en scène proche de The Killing Joke, Sale part d’un visuel de glace en fin de page pour passer sur la suivante à un gros plan sur des glaçons baignant dans des bulles. Il effectue ensuite un travelling arrière au cours duquel les bulles sont remplacées par les étoiles. Le champ s’élargit, dévoilant un dîner aux chandelles entre Superman et Loïs. Progressivement, le lecteur devine qu’ils sont au 3e étage de la Tour Eiffel. Réhaussée par le contraste entre les couleurs chaudes des bougies et le bleu des glaçons et du ciel étoilé, cette scène est d’une beauté saisissante. L’artiste transfigure le poncif du rendez-vous romantique au sommet de la dame de fer (pas Tatcher, l’autre) en lui apportant une fraîcheur réjouissante.





Un autre dessin résume tout le talent narratif de Sale. À la fin du deuxième épisode, Superman écrase de son ombre Loïs qu’il domine doublement, par son physique impressionnant et par le fait qu‘il flotte au dessus d‘elle. Mais jamais il n’a paru si démuni face à elle. Dans cette magistrale composition, l’artiste représente l’homme d’acier au trois quart de dos, ne laissant apparaître qu’une petite partie de son visage : un œil, un sourcil, la commissure des lèvres. Et cela suffit au dessinateur pour faire transparaître tout le désarroi du kryptonien. Seulement deux mètres séparent les deux personnages mais cette distance semble immense, infranchissable. Si on peut saluer le talent de Tim Sale pour retranscrire les émotions des protagonistes, on ne peut qu’être admiratif lorsqu‘il arrive à donner une identité forte à un bout de roche. Sa kryptonite semble palpiter d’une vie menaçante. Sa texture, ses ombres inquiétantes sont d’ailleurs superbement mises en valeur par une palette de couleurs dérangeante. En effet, Sale s’est adjoint les services du très talentueux Dave Stewart (non, pas le guitariste d’Eurythmics, le coloriste). La technique de Dave Stewart tranche radicalement avec la colorisation de Bjarne Hansen sur Superman For All Seasons. Pour coller au récit, il a adapté son style et abandonné ses aplats sombres et sa palette volontairement limitée utilisée sur Hellboy. Il a notamment enrichit son style d’effets mouchetés et surtout d’un usage des ombres très pertinent qui permet d’apporter une profondeur supplémentaire aux expressions des personnages. Bonne pioche.



Conclusion : Sans être une œuvre fondatrice, Kryptonite nous invite à une redécouverte touchante des débuts de Superman . Hélas, ce récit souffre de deux handicaps : une trame convenue et la comparaison inévitable avec Superman For All Seasons qui le surclasse en tout point. Mais l’émotion qui se dégage de la lecture et le talent du trop rare Tim Sale justifient à eux seuls sa lecture. À noter qu’Urban a eu la bonne idée d’inclure dans son édition un vieil épisode relatant la première apparition dans les comics de la kryptonite.



Points forts : Un Superman enfin humain - Tim Sale !!! - Un récit accessible et indépendant



Points faibles : Des faiblesses scénaristiques - Une réussite qui aurait pu être plus éclatante



Note : 4,5/5


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  • Sasahara
    Sasahara

    il y a 11 ans

    ... et si on n'aime pas Tim Sale, qu'est-ce qui reste ? une économie de 15 euros !

  • DarkChap
    DarkChap

    il y a 11 ans

    J'adore. Un véritable chef-d'oeuvre. Cooke a vraiment eu l’idée de génie de lier la Kryptonite à l’humanité de Superman. Superman n’est pas un dieu mais le développement progressif de sa toute puissance et son invulnérabilité peuvent lui faire craindre qu’à termes il perde son lien à l’humanité. En cela, faire de la Kryptonite ce qui lui rappelle qui il est et le pousse à sortir avec Lois non en tant que Superman mais en tant que Clark tient de l’idée de génie. C’est une suite directe au Man of Steel de Byrne qui marche à la perfection avec la réécriture plus humaine du personnage.

  • Drfeelgood
    Drfeelgood

    il y a 11 ans

    Très bon superman d'ailleurs je n'ai jamais compris pourquoi superman ne marche pas aussi bien que batman juste pour le coter soi-disant parfait du héros alors que si on fait juste un pas en avant il y a quand mal pas mal de récit qui le rende + qu'humain

  • AfA
    AfA - Rédacteur de l'article Staff MDCU

    il y a 11 ans

    Sasahara. Oui, tu peux économiser 15 € mais tu peux aussi apprécier le scénario qui met en valeur l'humanité de Superman. Ce récit n'est pas dans le Top 10 uniquement pour le dessin. Cela dit, le trait de Sale est très particulier et je comprends qu'on puisse ne pas l'apprécier. Mais, avec un bon scénario, il arrive qu'on découvre des qualités à un dessinateur.

  • DarkChap
    DarkChap

    il y a 11 ans

    Drfeelgood a écrit:
    Très bon superman d'ailleurs je n'ai jamais compris pourquoi superman ne marche pas aussi bien que batman juste pour le coter soi-disant parfait du héros alors que si on fait juste un pas en avant il y a quand mal pas mal de récit qui le rende + qu'humain
    C'est parce qu'il est l'un des nôtres, un humain avec ses forces et ses faiblesses, qu'il peut être le meilleur d'entre nous. "Do good to others and everybody can be a Superman"

  • Sasahara
    Sasahara

    il y a 11 ans

    Bon Ok, il ne faut jamais dire jamais! Un jour peut-être ! Mais je débute tout juste comme lecteur de Superman, c'est d'ailleurs pourquoi je suis de près votre liste des 10 meilleurs! ...pour l'instant je suis en train de lire "Earth One" et c'est franchement plus mon truc, à tous niveaux; s'il n'est pas dans votre top 10, il sera sûrement dans le mien ! (avec "Origines" de Waid et Yu et "le dernier fils", les 2 autres albums que j'ai déjà lus)

  • AfA
    AfA - Rédacteur de l'article Staff MDCU

    il y a 11 ans

    Sasahara, un top ten est forcément subjectif mais je te promets que dans les 7 comiics qu'il nous reste à présenter se trouvent de véritables chefs-d'oeuvre. Stay tuned.