La review du jour est un titre proposé par Urban Comics. Il s'agit de Spectateurs, écrit par Brian K. Vaughan et dessiné par Niko Henrichon. Il est sorti le 17 octobre pour 36 euros. Il contient les titres US Spectators HC.
Val a quarante ans. Fan de soap-opéras et de films pornographiques, elle se rend au cinéma. Là, elle est sauvagement abattue de plusieurs balles dans le corps. Val se retrouve alors bloquée dans un état spectral, sans comprendre ce qui vient de lui arriver. Elle découvre bien vite qu'elle peut hanter le monde des vivants avant de décider de partir vers le monde d'après. En tant que fantôme, elle ne peut entrer en contact avec les vivants, mais il est une chose qu'elle peut faire à volonté : observer.
J'apprécie fortement la variété des couples... mais il nous manque toujours un authentique ménage à trois, non ?
Spectateurs est un OVNI. Je ne sais tout simplement pas quoi dire. Après autant d'années lectures, il n'est pas rare d'en venir à se demander si on n'aurait pas fait le tour, tout doucement. Mais de temps en temps, il y a un titre suffisamment différent pour que l'on se pose cinq minutes pour faire le point et que l'on finisse par se dire : ok... c'était différent.
Le principe de base est déjà délicat à imaginer puisque nous allons suivre un fantôme (et, plus tard, deux fantômes). De là, on peut donc imaginer des possessions, des déplacements d'objets et tout le tralala. Sauf qu'ils le disent eux-mêmes : ce n'est pas Ghost. Alors, que font-ils ? C'est ça le truc. Ils ne font rien. Ils observent, discutent, commentent, débatent. Nous suivons des personnages qui cherchent des choses intéressantes à observer un peu comme s'ils étaient devant une télévision sauf qu'au lieu de changer de chaîne, ils changent de bâtiment.
Mais alors, comment s'intéresser à des gens qui ne font qu'observer des choses ? Déjà, il y a bien un fil rouge. Ce dernier est basé sur trois éléments majoritairement : les deux fantômes, le thème du cinéma qui est une discussion qui revient beaucoup et la fin du monde. Ces trois thèmes permettent de se raccrocher à quelque chose et de ne pas avoir le sentiment de passer du coq à l'âne (pour éviter le côté "changement de chaîne" justement) mais ce n'est pas tout. Les personnages se dévoilent, les dialogues sont profonds et les observations foisonnent. Quelles observations ? Les deux : les leurs et les vôtres. A travers leurs yeux, vous découvrez une Amérique qui n'a plus aucun mur, plus aucun secret. Être spectateur de notre planète, c'est observer de la baise, la connerie humaine, les faux-semblants, la baise, la guerre, le tout entouré de baise. Les thèmes sont nombreux, les critiques (directes ou plus dissimulées) sont nombreuses et les réfléxions sont variées (on va de Schwarzenegger à la place du voyeurisme dans notre société, ce n'est pas rien).
La fin est proche, mes salopes !
Pour ce qui est de la partie graphique, elle est bonne. Dans une BD, c'est important (je ne vous apprends rien, je pense) mais lorsque l'on parle d'une BD dans lequel on suit deux personnages qui observent... c'est d'autant plus important. Ce n'est pas un récit avec de l'action non stop. On observe, on commente, on découvre, on voyage un peu. C'est un rythme plutôt lent avec beaucoup de dialogues parfois. Autant dire que dans ce titre de récit, les dessins sont vraiment fondamentaux. Et clairement, Henrichon s'en sort très bien. Décors, poses des personnages et surtout les visages, c'est un véritable régale. Mention spéciale aux trois-quatre dernières planches qui, pour une fois, sont des plans larges qui prennent toute la planche (voire deux planches) et qui sont tout bonnement magistrales.
Seul bémol, les dessins qui tendent plus vers la science fiction sont un peu timide. C'est peut-être un parti pris, mais cet aspect aurait méritait un peu plus de place sur les différentes planches.
Autre facteur intéressant à étudier : la colorisation. Ici, seuls les fantômes sont en couleurs. Le reste est en noir et blanc. Ce choix est intéressant car il interpèle sur la place de chaque personnage. Dans un sens, mettre les couleurs sur les fantômes est logique. Ce sont eux qui font avancer l'histoire. Le reste tient plus du film qui "passe devant leurs yeux". Les fantômes commentent, changent de lieu, réagissent. Ils sont donc le moteur de l'action. D'un autre côté... on a beau dire... ils ne sont que des observateurs. Aussi, leur attribuer les couleurs alors qu'ils ne font rien à proprement parler est tout aussi déroutant que logique. Au final, nous avons donc un choix graphique efficace et... intriguant !
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