Interview de Trevor Hairsine au TGS 2018

Interview de Trevor Hairsine au TGS 2018

Mine de rien, ça fait déjà 25 ans que Trevor Hairsine navigue à vue dans le p’tit monde des comics et 25 ans que le bougre tire son épingle du jeu dans le sillage d’éditeurs comme 2000 A.D. , DC Comics, Valiant ou Marvel. À ce titre, en 2005 il a fait partie des membres des Young Guns, un groupement d’artistes prometteurs de la Maison des Idées pour qui toutes les portes se sont ouvertes. Et contre toute attente, Trevor Hairsine est parti bosser du côté de la bande dessinée traditionnelle européenne pour se faire les dents sur quelque chose de nouveau.
Véritable électron libre, le sieur Hairsine n’en reste pas moins un artiste hors norme qui garde les pieds sur terre. Ainsi, après plusieurs années passées chez Valiant aux côtés de Matt Kindt sur des titres comme Divinity ou Eternity, l’illustrateur montre une certaine motivation à façonner des histoires dans lesquelles il croit dur comme fer. Invité lors du Toulouse Game Show 2018, on a eu la chance de pouvoir passer quelques minutes avec lui pour en savoir plus sur lui. D’un naturel réservé, presque timide, l’artiste a bien voulu répondre à nos questions…

Après plus de 25 ans à travailler avec Marvel, DC, Valiant et bien d'autres, comment voyez-vous l'évolution de l'industrie des comics ?

Je crois que l'industrie des comics a beaucoup évolué depuis mes débuts. J'ai l'impression qu'on se trouve maintenant dans une sorte de période charnière où les comic books permettent le développement de films en fonction des investissements qui y sont consacrés. Ainsi, je pense que les gros éditeurs comme Marvel ou DC pensent à la possibilité de mettre en place un film à chaque fois qu'ils sortent un nouveau comic book…

Un an après le mouvement #MeToo, pensez-vous que la place de la femme a évolué dans le monde des comics ?

La plupart des éditeurs, notamment les plus importants se sont vite mis au diapason concernant la place de la femme dans les comics et font tout pour rester dans les bons rails !

"Matt Kindt c'est aussi un illustrateur donc c'est plutôt facile de travailler avec lui dans la mesure où il sait comment travaille un artiste"

…parce qu'ils le veulent ou parce qu'ils le doivent ?

Je ne dirais pas qu'ils sont obligés de changer, mais il faut bien avouer qu'ils sont conscients de l’évolution des mentalités dans la société actuelle… mais aussi du lectorat qui se féminise de plus en plus ! Quoiqu'il en soit, je trouve que cette prise de conscience par tous les éditeurs est une bonne chose.

En 2005, vous étiez élevé au rang de young guns chez Marvel aux côtés de pointures comme Olivier Coipel ou Steve McNiven. Or, peu de temps après, vous avez laisse de côté les comics pour vous consacrer à la BD Franco-Belge au travers de Cla$$war. Pourquoi ne pas avoir choisi de travailler sur quelque chose de plus mainstream ?

(Il réfléchit.) À cette époque, je voulais expérimenter des choses nouvelles et explorer des univers que je ne connaissais pas vraiment comme la bande-dessinée franco-belge, par exemple. Je voulais me tester et sortir de ma zone de confort car j'en avais un peu marre de toujours travailler sur les mêmes personnages et les mêmes histoires dans les comics. Avec du recul, je pense que c'était une bonne décision puisque ça m'a permis de revenir avec plus d'envie vers les comics américains et de m'y investir à fond… Quoiqu’il en soit, j’en garde un très bon souvenir, c'était une super expérience !

Selon vous, quelle est la différence entre les comics européens et américains ?

Je dirais qu’il y a des différences sur presque tous les points ! (rires) Il y a des différences des concepts de départ jusqu'au lectorat tout en passant par la façon de remplir les pages… Mais pour moi, la différence principale c'est que l'âge des lecteurs de comics diffère entre l'Europe et les États-Unis. En Europe, les fans sont un peu plus matures qu'aux USA. Du coup, les histoires des comics européens sont parfois plus brutes qu'aux États-Unis.

En tant qu'artiste, vous avez senti une différence dans la manière de travailler sur la BD franco-belge et les comics américains ?

Pas vraiment… si ce n'est dans la manière de remplir les pages. En effet, les éditeurs européens préfèrent qu'il y ait pas mal de cases dans chaque planche, par exemple. De même, les formats ne sont pas les mêmes. De ce fait, la manière de travailler s'en ressent puisqu'il faut aller droit au but aux États-Unis, tandis qu'on peut prendre un peu plus du temps pour poser l'histoire sur la BD traditionnelle, on peut se permettre de peaufiner les détails, etc.

Ça fait déjà quelques temps que vous travaillez régulièrement avec Matt Kindt sur Eternity. Comment définiriez-vous la suite de Divinity ?

Eternity est clairement une extension de l'univers de Divinity, mais c'est aussi une véritable évolution dans un certain sens car on a fait en sorte d’axer notre travail sur le développement des personnages, notamment pour Abram et Myshka sur qui est centrée cette nouvelle série. On a aussi beaucoup mis l'accent sur les différents univers qui vont s'offrir à eux…

"En Europe, les fans sont un peu plus matures qu'aux USA. Du coup, les histoires des comics européens sont parfois plus brutes qu'aux États-Unis"

Comment se passe votre collaboration avec Matt Kindt ? Vous vous connaissez depuis longtemps ?

En fait, je n'ai jamais rencontré Matt. On ne se connaît que par messageries interposées ! (rires) Mais ce qui est bien, c'est que c'est aussi un illustrateur donc c'est plutôt facile de travailler avec lui dans la mesure où il sait comment travaille un artiste. De fait, les descriptions de ses scripts sont très visuelles et parfois il fait même des petits sketches - avec son style bien à lui - pour véritablement décrire sa façon de voir telle ou telle scène. Il m'appartient alors de retravailler son idée avec mon propre style et de lui présenter mon travail. C'est donc génial de bosser avec lui car en tant qu'artiste lui-même, il sait se mettre à ma place et me faciliter la tâche !

Et vous avez carte blanche dans tous vos dessins ?

Oui, totalement ! Matt me donne sa vision des choses ou parfois certains de ses sketches puis c'est à moi de faire le reste. Il est vraiment très cool, là-dessus !

Combien de temps ça a pris pour mettre sur pied Eternity ?

En fait, c'était assez rapide car mon duo avec Matt fonctionne à merveille ! Qui plus est, on a commencé à travailler sur Eternity dès la fin de Divinity #3 et vu que ça fait pas mal de temps qu'on travaille ensemble, on n'a pas de mal à enchaîner les deux séries : tout s'est fait de manière très naturelle.

Pensez-vous que Divinity ou Eternity puissent être un jour adaptés pour la télévision ou le cinéma ?

Ce serait super ! Je pense que ces séries ont de très bonnes histoires et des univers intéressants qui mériteraient d'être adaptés. Ceci étant, je pense que le rendu serait bien meilleur au cinéma qu'à la télévision car pour mettre en place des adaptations plutôt fidèles à Divinity ou Eternity, il faudrait y mettre pas mal de moyens. À l'heure actuelle, ni Matt ni moi avons été approchés par des studios de cinéma… mais on croise les doigts pour que ça arrive ! (rires)

Par le passé, vous avez travaillé avec des légendes comme Brian Michael Bendis, Ed Brubaker, Warren Ellis ou Matt Kindt… Votre notoriété vous permet-elle de choisir vos scénaristes ?

Oui, c'est possible. En règle générale je n'ai pas à le faire car les éditeurs chez qui j’ai travaillé me connaissent et ils savent quels sont les équipes qui me conviendront le mieux. Ça a été notamment le cas chez Valiant avec Warren Simons. Mais pour être honnête, je dois t'avouer que je n'ai jamais reçu de mauvais script ou travaillé sur de mauvaises histoires, donc je n’ai pas eu l’occasion de mettre mon grain de sel… Qui plus est, ça fait maintenant plus de quatre ans que je travaille avec Matt Kindt et son travail est toujours aussi excellent !

Vous êtes un artiste britannique. Un mot sur le Brexit ?

Personnellement, je pense que ça craint ce Brexit. Je crois que ce n'est pas une bonne chose pour le Grande-Bretagne car la société ne doit pas se refermer sur elle-même : elle doit être unie et ouverte sur l'extérieur. Si je devais dire quelque-chose de positif sur le Brexit, je dirais que j'espère que ça va permettre à la population de se recentrer et de faire quelque chose de bien…

Que peut-on attendre de vous en 2019 ?

Je vais travailler un peu pour DC Comics dans le courant de l'année prochaine sur un projet dont je ne peux pas encore parler… il faudra peut-être regarder du côté de la Justice League ! (rires)

Un grand merci à Amélie, Guillaume ainsi qu’à toute l’équipe du Toulouse Game Show 2018

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