[Review VF] Providence : L’intégrale

[Review VF] Providence : L’intégrale

Après une publication en 3 tomes parus en 2016 et 2017, Panini nous propose de redécouvrir la maxi-série Providence écrit par le fameux Alan Moore dans une version intégrale. Nous allons voir le contenu de ce gros album, et si l’auteur ne faillit pas à sa réputation.

Alan Moore est une légende des comics pour avoir écrit entre autres Watchmen, V pour Vendetta ou Killing Joke, mais ce n’est qu’une partie de son œuvre. Au-delà de la bande dessinée, il écrit aussi des nouvelles, et en 1994, il rend hommage à H. P. Lovecraft avec un récit nommé The Courtyard. Presque 10 ans après, en 2003, une adaptation en comics est publiée chez Avatar, par Anthony Johnson avec des dessins de Jacen Burrows. Plus tard, en 2010, suite à des problèmes financiers, Moore en écrit la suite nommée Neonomicon. Providence clôt la trilogie avec une histoire plus travaillée, et une publication de 2015 à 2017, toujours chez Avatar.

En France, assez étonnamment, toutes les histoires ne sont pas parues chez le même éditeur. Les deux premières histoires, Côté cour et Neonomicon, ont été regroupées en un album, intitulé Neonomicon, chez Urban Comics. Côté cour ne fait que deux chapitres, et se focalise sur un agent du FBI qui enquête sur une société occulte. Très littéraire, puisque adaptée d’une nouvelle, l’histoire est très proche de l’univers lovecraftien. Neonomicon, quant à lui, est composé de quatre chapitres, et prend directement la suite de Côté cour. Moins de texte, plus de dialogues, le récit va rajouter une dimension pornographique à l’univers très timoré de Lovecraft. Il va aussi aller plus loin dans la réflexion et la vision de l’oeuvre de l’écrivain, en ancrant ses écrits dans la réalité.

Providence est la plus aboutie des trois histoires. Déjà, elle est composée de 12 chapitres. Bien que le récit débute en 1919 (Côté cour se déroule en 2004), il va vite créer des liens avec les récits précédents, et va même aller jusqu’à les compléter. Vous comprendrez donc que lire l’album d’Urban avant celui de Panini est plutôt recommandé. De plus, Alan Moore y va très fort dès le début sur les références à l’oeuvre de Lovecraft. Le meilleur moyen de profiter de Providence reste d’avoir lu le travail de l’écrivain en plus des mini-séries de Moore. Néanmoins, l’album peut être lu indépendamment du reste, mais dans ce cas, il faut s’attendre à ne pas en saisir les subtilités.

  

Après cette mise en contexte, nous allons revenir à l’album en lui-même. Nous y suivons un journaliste, Robert Black, qui décide de se lancer dans l’écriture d’un roman. Pour trouver l’inspiration, il va démissionner et partir à la recherche d’un livre d’alchimie arabe dont la lecture rendrait fou, et qui contient notamment des moyens de prolonger la vie. Partant de New York, il va aller parcourir la Nouvelle Angleterre. Un rythme va se mettre en place, avec chaque chapitre se déroulant dans un lieu particulier et faisant référence indirectement à des oeuvres de Lovecraft. Dès le début de l’album, le récit est plus posé et plus travaillé que Neonomicon. L’ambiance étrange offre une horreur rampante et saisissante.

Nous allons assister à des évènements apparemment surnaturels, mais Black va toujours rationaliser ce qu’il lui arrive. Moore utilise pour ça un procédé qui brise le quatrième mur. Dans le récit, Black transporte sur lui un carnet qui lui sert à noter toutes les idées pour son futur roman, mais aussi de tenir l’avancée de son enquête. Après chaque chapitre, Moore nous propose de lire le contenu de ce carnet, nous permettant de découvrir le point de vue du personnage sur les événements qu’il vient de vivre. Et même s’il y a quelques redondances, nous nous glissons par ce biais dans sa tête, tout en rendant hommage aux textes à la première personne de Lovecraft.

Forcément, avec ce procédé, et le travail de dingue de Moore, l’album est d’une colossale richesse. La lecture est exigeante, et il faut s’y lancer avec toute la disponibilité nécessaire. De ce côté-là, l’auteur est fidèle à lui-même, et rappelle notamment tout le travail sur l’univers de Watchmen avec les documents annexes, ou encore la recherche documentaire poussée dans From Hell. D’ailleurs, de ce dernier, on retrouve les longs dialogues entre deux personnages traitant de sujets et d’autres. C’est très instructif, et très bien écrit. Le récit est de plus pourvus de nombreux sous-entendus, ce qui donnera un intérêt certain à la relecture.

  

Le personnage de Black est plutôt intéressant. Tout du long de son voyage, et de ses rencontres, la réalité va se mélanger au rêve et à la folie. C’est une ambiance très particulière et bizarre, en flirt constant avec le fantastique. Moore joue avec son récit, et ne le rend pas linéaire, en introduisant des flashbacks parfois sans mise en contexte. L’album est palpitant et il est difficile d’en ressortir indemne. L’idée présentée dans Neonomicon de faire de Lovecraft plus qu’un simple écrivain est magnifiquement exploitée. D’ailleurs, Black finira par le rencontrer, et Moore poussera le concept jusqu’au bout. C’est juste brillant. A cela, l’auteur s’amuse encore à ajouter une dimension sexuelle à une oeuvre qui en est dépourvue (ou alors sous-entendue).

Le dessin de Jacen Burrows monte aussi d’un cran dans cet album. Son style assez austère se rattrape par les détails et la précision de ses planches. Moore a trouvé quelqu’un qui arrive à retranscrire à la perfection son récit. L’album contient de nombreuses pages de bonus, notamment une grosse galerie de couvertures. Il y a aussi un texte très intéressant à la toute fin qui nous donne des premières pistes pour expliquer le récit de Moore. Malheureusement assez mal écrit, il permet néanmoins de s’attarder sur des éléments dans chacun des chapitres, et de les lier à l’oeuvre de Lovecraft, ce qui est plutôt utile si vous n’avez jamais lu ses nouvelles. Enfin, petit bémol, l’album, imprimé en Chine, semble de moins bonne qualité que ceux imprimés en Italie.

En Résumé

 

LES POINTS FORTS

- L'utilisation de l'oeuvre de Lovecraft
- L'ambiance fantastique
- Le voyage

LES POINTS FAIBLES

- Rien

 

5

Chef d'oeuvre

Conclusion

Plus qu’un hommage, Moore se sert de l’oeuvre incroyable de Lovecraft pour en faire une relecture tout aussi géniale. D’une grande richesse, vous ne sortirez pas indemne de cette aventure aux portes de l’occulte et du fantastique. Du pur génie.

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