Dossier Neil Gaiman : Miracleman, Angela et procès en série

Dossier Neil Gaiman : Miracleman, Angela et procès en série

Habitué des comics intellectuels, des romans et autres nouvelles, on pourrait croire Neil Gaiman ne s'intéresserait pas aux héros costumés. Ce serait mal le connaître : non seulement il ne s'interdit aucun genre et ignore les frontières littéraires mais certaines de ses contributions prouvent incontestablement son amour des super-héros. Dommage que ses histoires d'encapés finissent souvent par des procès.
 


Miracleman

 

Présentation

Le tout premier comic book écrit par Gaiman pour les USA fut un titre de super-héros. Certes, il était difficile de trouver autre chose dans les années 80. Mais il ne s'agissait pas de n'importe quel super-héros. Miracleman, copie britannique ringarde du Captain Marvel de DC, venait de subir une remise à jour drastique par un scénariste appelé à révolutionner l'univers des encapés : un certain Alan Moore. Le génie de Northampton a consacré 16 épisodes à créer le premier récit super-héroïque pour adultes, n'hésitant pas à aborder de manière crue et frontale des thèmes très sensibles. Lorsqu'il quitte la série, son histoire est achevée et tout semble avoir été dit. Lui succéder semble aussi inutile que périlleux. Pourtant, il décide de confier les rennes de la série à son ami et jeune compatriote, le débutant Neil Gaiman.

 

Celui-ci va surprendre en abordant le titre avec un angle contemplatif. Plutôt que de tenter de raconter de nouvelles aventures, il va dans un premier temps s'intéresser aux humains habitant ce monde, quelques années après les événements racontés par Moore. Cette vision latérale surprend par sa maturité et préfigure la qualité littéraire, la richesse de la réflexion et la poésie qui feront de Sandman un chef-d'oeuvre incontesté. Gaiman avait prévu de faire 3 cycles de 6 épisodes, respectivement intitulés The Golden Age, The Silver Age et The Dark Age. La faillite de l'éditeur Eclipse interrompra l'aventure au début de la publication de l'arc The Silver Age, laissant le récit inachevé. Outre les épisodes 17 à 24 parus, Gaiman a également participé à la mini-série Miracleman : Apocrypha.
 


Pendant deux décennies, la suite de l'histoire restera dans les limbes, notamment à cause d'une nébuleuse histoire de droits et d'un procès à rebondissements entre Todd McFarlane et Neil Gaiman. Voici un résumé plus qu'approximatif de cette bataille judiciaire très complexe : McFarlane a racheté les droits des héros publiés par l'éditeur Eclipse après la faillite de celui-ci. Cependant, Gaiman, qui co-possédait les droits de Miracleman, contestait le rachat des droits. Après des années de procédure, Gaiman obtint gain de cause. De son côté, Marvel a acheté les droits de Miracleman, rééditant dans un premier temps les épisodes antérieurs à Eclipse. A cette époque, Miracleman se nommait Marvelman. Marvel, qui trouvait que le nom de ce personnage pouvait porter à confusion, fit un procès, qu'il gagna, pour que Marvelman soit rebaptisé. C'était une décision injuste car Marvelman avait été créé avant la marque Marvel. C'est donc avec certains grincements de dents que les lecteurs ont vu les droits du personnage échoir à Marvel. Les problèmes de droit des épisodes d'Eclipse étant enfin dissipés, Marvel vient d'entamer la réédition tant attendue de ce chef-d'oeuvre. A l'issue de cette réédition, Gaiman pourra enfin compléter l'histoire qu'il a commencé au début de sa carrière.
 

 


Notre avis
Le lecteur risque d'être dans un premier temps décontenancé par les épisodes de Gaiman. Après les trois premiers et merveilleux tomes écrits par Alan Moore, Gaiman prend une direction inattendue et adopte un ton radicalement différent de celui de son prédécesseur. A défaut de suite, nous avons des récits indépendants s'attardant à chaque fois sur un personnage dont l'existence va être bouleversée par la présence des surhommes. Avant même Sandman, le concept de divinité est brillamment exploité par le scénariste. Subtils, intelligents et sensibles, ces épisodes sont évidemment recommandés mais on attend surtout que l'auteur achève son œuvre et nous livre la suite des aventures de Miracleman en replaçant le casting original au cœur de la série.


En français
Les épisodes de Gaiman sont inédits à ce jour en France. Heureusement, Panini traduisant les recueils de Marvel dès leur publication aux États.-Unis, les fans français peuvent être assurés de lire dans la langue de Molière l'intégralité de la série dans une belle édition. Le premier des 3 tomes de Moore est déjà paru et le deuxième arrive sous peu. Ceux de Gaiman suivront dans la foulée.

 


 

Spawn et Angela

 

Présentation
Lorsque Todd McFarlane quitta Marvel avec quelques camarades pour créer Image, il avait pour objectif d'être propriétaire des droits de ses créations. Ainsi, comme chaque membre fondateur de la nouvelle maison d'édition, il créa son personnage : Spawn. Mais McFarlane fit vite appel à quelques scénaristes réputés (Alan Moore, Frank Miller et Dave Sim) pour l'épauler le temps d'un épisode. Neil Gaiman accepte également l'invitation et scénarise l'épisode 9 dans lequel il crée Angela, ange chasseur de spawns, Medieval Spawn et Cogliostro. Il écrira même une mini-série dédiée à Angela. Quelques temps plus tard, Neil se rend compte que McFarlane réutilise ses créations sans son accord. En exploitant le travail des autres, le Canadien applique à son profit les pratiques de Marvel et DC qu'il dénonçait jadis. Contrarié, Gaiman poursuit McFarlane en Justice (les histoires judiciaires entre les deux hommes pourraient aisément remplir un roman). Il récupère les droits d'Angela et les vend à Marvel. Désormais, les épisodes écrits par Gaiman pour McFarlane ne peuvent être réédités et Angela se promène désormais dans l'univers Marvel, notamment dans Les Gardiens de la Galaxie.

 

Résumé

L'Enfer et le Paradis sont en conflit et chaque camp recrute ses guerriers. Spawn, jeune recrue du côté obscur de la force, se voit chasser par un redoutable ange guerrier, Angela.
 


 

Notre avis

Dans la continuité des épisodes précédents, Spawn 9 et la mini-série Angela ne jurent pas avec le reste de la production de McFarlane. Il s'agit d'une lecture mainstream plaisante mais qui n'a pour seule ambition que de distraire le lecteur et d'enrichir le monde de Spawn (et son créateur au passage). Sympathique mais pas indispensable.
 

En françaisLes problèmes de droit empêchant toute réédition, il faut se tourner vers le numéro 5 du magazine Spawn publié par Semic pour trouver l'épisode 9 et le Planète Comics 2 toujours chez Semic pour la mini-série Angela. Épuisés depuis des années, il faut les chercher chez les bouquinistes ou sur Internet.

 


 

Petite anecdote personnelle

Alors que Neil Gaiman et Todd McFarlane étaient tous deux en dédicace sur Paris le même jour (mais pas au même endroit), je leur ai respectivement demander de signer le Spawn 9. Neil Gaiman fut le premier et ne semblait absolument pas surpris de trouver ce comics parmi la pile d'ouvrages à dédicacer. Plus tard, Todd McFarlane à qui je présentais le même numéro, a vu la signature de Gaiman. Il a alors plaisanté, disant sur le ton de l'humour « This is not my friend ». Il s'est ensuite prêté au jeu de la dédicace et a même accepté de se faire photographier avec le comic book signé par Gaiman et lui-même. Comme quoi, l'argent et les procès n'empêchent pas ces deux auteurs de se montrer très professionnels et soucieux de satisfaire leurs fans.

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  • SaigneurDuTemps
    SaigneurDuTemps

    il y a 10 ans

    Je suis pas du genre à raffoler des autographes mais je ferais bien une exception pour Gaiman. Veinard !

  • AfA
    AfA - Rédacteur de l'article Staff MDCU

    il y a 10 ans

    Gaiman ne se contente pas de signer. Il fait aussi des dessins et peut écrire des messages drôles lorsqu'il signe un de ses livres. Pour Nobody Owens, l'histoire d'un enfant élevé dans un cimetière, il dessinait entre autres une pierre tombale sur laquelle il écrivait le nom de celui qui demandait un autographe. Quand je lui ai demandé de dédicacer le livre pour mon fils à naître, il a refusé de faire une pierre tombale pour un bébé non-né. Il a de l'humour et des principes.