[Review VF] Punk Rock Jesus

[Review VF] Punk Rock Jesus
Après ses excellents travaux sur des séries telles que Joe The Barbarian, American Vampire : Survival Of The Fittest ou encore Hellblazer, l'artiste Sean Murphy revient en grande pompe avec un projet personnel dont il est scénariste et dessinateur, la mini-série Punk Rock Jesus, toujours chez Vertigo.



Ce qui marque le plus quand on commence la lecture de cette œuvre, c'est l'originalité de l'histoire. On a vraiment l'impression de lire quelque chose de différent, ce qui n'est pas forcément toujours le cas pour des séries indés où les thèmes et genres peuvent s'avérer être très proches. Ici, dépaysement total. Le cadre d'une émission de télé-réalité n'est pas en soi original, on a récemment eu America's Got Powers et Idolized qui proposaient la même chose, mais l'angle de vue choisi sur cette télé-réalité et surtout son sujet principal, en font quelque chose de nouveau, d'intéressant et de très osé. Parler de religion, ce n'est pas toujours évident ni bien vu. Faire de Jésus Christ son personnage principal encore moins. Mais c'est justement ce qui attire tout de suite dans cette histoire, on se dit « un clone de Jésus à la télé ? C'est quoi cette idée de dingue ? » et on tient à savoir ce que ça va donner. Dans un sens, le concept en lui-même de cette série est déjà une bonne raison pour la lire. On va donc suivre la vie du petit Chris (vous avez repéré le jeu de mot, Chris pour Christ) depuis sa naissance devant les caméras de télévision. Etre le clone supposé de Jésus est un lourd fardeau à porter, d'autant plus quand tout autour de vous est mis en scène pour essayer de rendre ce fait encore plus réel et crédible. Sean Murphy va se servir du personnage de Chris pour montrer que finalement, être croyant, est avant tout un choix personnel. Même endoctriné depuis le plus jeune âge, une personne ne va pas forcément finir croyante dans le sentiers qui ont été tracé pour elle. Et c'est même d'ailleurs souvent le cas, lorsque l'on est forcé d'un côté, on a tendance à vouloir aller de l'autre. C'est ce que fait Chris pour qui le terme d' « ado rebelle » va vraiment prendre tout son sens. Et c'est vraiment bien amené parce que l'on va voir Chris se cultiver un esprit critique petit à petit pendant qu'il grandit. Et c'est bien de ça qu'il s'agit, développer son propre esprit critique, faire ses choix de croyance. Murphy ne tombe pas dans le manichéisme et la facilité en nous disant que la religion c'est mal et que le choix intelligent est d'être athée, non, puisqu'à côté de Chris, le personnage de Thomas est lui très croyant jusqu'au bout et cette croyance prend une part importante à l'histoire. Et au final, il n'y a pas de morale ou de choix juste, personne n'a raison et personne n'a tord. La question sur l'authenticité de Chris en tant que clone de Jésus, autant scientifiquement que vis à vis de la perception populaire, est d'ailleurs une des clés de l'histoire dont la résolution est habilement gardée pour la fin.



Mais Sean Murphy ne se limite pas à une seule intrigue, il a pleins d'idées le bougre et va essayer de condenser tout ça dans une seule histoire. On se retrouve donc avec une histoire parallèle sur Thomas, personnage au passé tragique qui a servi dans l'armée irlandaise et se retrouve à jouer les gros bras et gardes du corps dans l'émission de télé. Ce peut être un risque d'avoir plusieurs intrigues et autant de thèmes abordés au sein d'une même mini-série de seulement 6 chapitres mais Murphy gère bien sa narration et regroupe très vite ces intrigues et personnages autour d'un thème commun : la religion. Et au final, on en arrive même à se demander qui est le personnage principal, Chris ou Thomas ? Et c'est une bonne chose d'avoir ces deux piliers, qui nous proposent deux visions opposées de la foi, comme expliqué plus haut, et qui fonctionnent très bien ensemble. Ce Thomas est vraiment un excellent personnage, sous son apparence très dure et effrayante se cache un être aimant et protecteur que l'on apprend à découvrir tout au long de l'histoire à travers de très bons flashbacks.
Et puis, Sean Murphy avait aussi envie de parler de musique, tiens. Alors hop on ajoute un peu de Punk et de Rock dans la marmite et on mélange tout et ça fonctionne toujours aussi bien. C'est pas compliqué quand on est doué, n'est-ce pas ? Le Chris ado se rebelle dans la musique en montant un groupe et c'est une très bonne idée de la part de l'auteur puisqu'on sait que la musique existe en partie pour dans ce but, s'exprimer, faire passer ses idées à travers les textes des chansons. Et là Murphy a du vraiment se faire plaisir parce que ces textes justement, ils n'y vont pas de main morte ! Et la musique lui permet aussi d'être écouté à une échelle mondiale, bref, que de bonnes idées qui s’intègrent bien les unes aux autres et qu'on prend un malin plaisir à suivre.



Et ce n'est pas tout, l'auteur réussit avec un excellent premier numéro à créer tout un univers passionnant avec de nombreux personnages gravitant autour, tous plus intéressants et indispensables les uns que les autres. La mère de Chris, Gwen, est vraiment bien écrite aussi. On sent qu'elle est un peu embarquée dans toute cette histoire bien malgré et qu'elle va se retrouver totalement perdue, dépassée par les évènements. Ses réactions et ses choix sont vraiment crédibles et intéressants à suivre. Sa relation avec Thomas est aussi vraiment très chouette et jouera finalement un rôle très important dans toute cette histoire. Sarah Epstein, le médecin de l'émission, apporte une couche supplémentaire à l’épaisseur du récit avec encore un regard et une position différente par rapport à l'émission et aux évènements entourant la naissance de Chris. On a enfin le vilain de l'histoire, qui joue très bien son rôle de vilain et fait un très bon antagoniste, cupide et sans remords. Sans oublier dans le lot toute la bande de joyeux lurons de la nouvelle Amérique chrétienne menée par la très hystérique et charismatique Daisy Milton qui va jouer les troubles fêtes et l'élément perturbateurs à de nombreuses reprises.



Tous ces éléments et toutes ces histoires construisent un récit vraiment très dense et fourni, dans lequel on se retrouve totalement immergé. On a presque du mal à croire qu'il n'y a que six numéros. Et Murphy réussit cette prouesse sans forcément avoir un rythme de dingue tout du long, il prend vraiment le temps d'installer l'histoire et les personnages dans les premiers chapitres pour accélérer un peu plus le rythme et l'action sur la fin. Et c'est en fait là qu'interviendra ma seule critique sur cette œuvre, le rythme un peu trop rapide des deux derniers chapitres. J'ai l'impression que Murphy a peut-être été un peu rattrapé par le nombre de numéros et qu'il a dû tout caser en trop peu de pages. Il s'y passe beaucoup de choses assez folles qui s'enchainent un peu trop vites pour rendre le tout vraiment crédible. Tout au long du récit on a le droit à des choses à la limite du crédible mais écrites de manières assez drôles et plutôt bien orchestrées dans le rythme, ce qui fait que ça passe bien. C'est moins le cas sur la fin et ça donne malheureusement un petit sentiment de « too much » sur les différentes conclusions apportées au récit, alors que les choix faits par l'auteur sont plutôt satisfaisants. Et pour boucler la boucle, on a droit à une scène finale aussi originale que l'ensemble du récit, qui m'a particulièrement plu.



Si Sean Murphy se révèle être un très bon scénariste avec ce Punk Rock Jesus, il est avant tout un excellent dessinateur. Si l'histoire est déjà excellente, ses dessins le sont encore plus, alors imaginez le niveau. On commence à bien connaître son style hybride aux inspirations très diverses et son trait fin très expressif et tellement fluide. Et je suis toujours sidéré par ses décors et le nombre de détails qu'il arrive à présenter, on en a encore la preuve à de nombreuses reprises dans ce Punk Rock Jesus. Que ce soit lors des moments de présentation de l'émission avec une foule monstre, lors des concerts du groupe ou encore les magnifiques paysages à l'intérieur de la tour, tout est magnifique et demande de longues minutes pour tout apprécier. Et le noir et blanc met encore plus en valeur ses dessins et le travail qu'il y a derrière. Graphiquement, c'est du très haut et on y est habitué avec Sean Murphy.


Sean Murphy nous offre un récit on ne peut plus original, qui aborde des thèmes forts et sensibles sans tomber dans la facilité, avec de nombreux personnages plus attachants les uns que les autres. La narration est inspirée et l'écriture intelligente et sensée, le tout sublimé par un des meilleurs traits du milieu. Malgré une conclusion un peu bousculée, on est face à du comic book de haute volée et pas loin du chef d'oeuvre. En tout cas, c'est une bonne grosse pépite à ne surtout pas manquer.


[conclusion=4,5][/conclusion]
[onaime]- L'originalité de l'histoire
- Les thèmes abordés
- Les personnages
- La narration
- Les dessins[/onaime][onaimepas]- Une conclusion un peu bousculée[/onaimepas]
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  • Taritchi
    Taritchi

    il y a 11 ans

    Même avis, un Excellent titre qui aurait pus être Parfait si il avait rajouté 5/6 page pour mieux détaillée certain passage passez à la vas vite. Bref, un Immanquable !!!