Personnage emblématique, apprécié et reconnu, Batman est sans conteste l’un des super-héros les plus populaires du monde des comics-books. Depuis sa création en 1939, Batman a eu le droit à de nombreuses histoires et plusieurs portent le titre d’incontournables. Si on vous interroge sur une histoire, un auteur, c’est incontestablement [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i] de Frank Miller qui est le plus souvent cité.
Véritable chef d’œuvre, c’est cette histoire, qui narrait les derniers jours d’un Batman vieillissant et plus torturé que jamais, qui a permis de moderniser le personnage et d’en faire le héros sombre et psychotique qu’il est aujourd’hui.
Le titre avait été réédité par Urban Comics en novembre dernier et vous pouvez d’ailleurs en lire la review en cliquant [url=http://www.mdcu-comics.fr/news-009760-urban-comics-review-vf-batman-the-dark-knight-returns.html]ici[/url].
L’histoire a beau être sortie à la fin des années 80, elle est encore sur toutes les lèvres aujourd’hui. Au début des années 2000, Frank Miller décide de revenir sur le personnage et d’écrire une suite à son récit, une suite qui finit par sortir en 2002 et qui se nomme [i]Batman : The Dark Knight Strikes Again[/i].
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Après avoir réédité [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i], Urban Comics décide donc de boucler la boucle et de faire de même avec cette histoire. Cette suite est-elle à la hauteur de son aîné ? Frank Miller a-t-il réitéré l’exploit ? Et bien, je vais tout de suite répondre par un fracassant NON ! En effet, [i]Batman : The Dark Knight Strikes Again[/i] (qui a aussi été connu sous les titres de [i]Batman : DK 2[/i] ou [i]Batman : The Dark Knight La Relève[/i]) est bien plus controversé que son grand-frère et fait même pâle figure à côté de lui.
Avant de poursuivre, je rappelle qu’il faut évidemment lire [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i] avant de s’attaquer à cette histoire. Les deux sont également des Elsewords c’est-à-dire des récits hors-continuité et se détachant totalement de la chronologie de l’univers DC.
[i][b]J’ai attendu… En regardant le monde aller droit en enfer… / Batman.[/b][/i]
Un monde à la dérive contrôlé d’une main de fer par Lex Luthor et Brainiac, des super-héros terrassés, contrôlés et humiliés mais surtout un Batman, plus en colère que jamais, de retour et bien decidé à changer tout cela… Avouez que le pitch était vraiment alléchant d’autant que Miller avait promis de faire intervenir d’autres personnages de l’univers DC notamment la JLA. Le Chevalier Noir revient, il est plus vieux mais n’est plus seul puisqu’il a son armée avec lui. Mais surtout, il est plus en colère que jamais et pour s’en rendre compte, il suffit de voir les différentes couvertures de la mini-série (notamment celle représentant Batman avec le point levé, position symbolique du révolutionnaire) ou encore de l’édition d’Urban, très bien choisie pour l’occasion. Batman est certes de retour mais il a changé, ce n’est plus un héros, ce n’est plus un justicier mais c’est un révolutionnaire qui tente de reprendre le pouvoir, tombé aux mains des politiques corrompus et des industriels véreux. Comme dans [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i], Miller fait passer un message politique et social à travers son récit. L’auteur se lâche et met toutes ses tripes dans son histoire où il fait transparaitre toute sa colère, toute sa haine et toute sa rage envers la société américaine, une société qu’il ne comprend plus, qu’il ne tolère plus, qu’il n’accepte plus et qu’il veut changer. Ainsi, il y a beaucoup de fureur dans l’écriture de Miller, bien plus que dans [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i]. Frank Miller rend Batman à son image : vieux, fatigué et haineux envers une société qu’il juge en pleine décadence.
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Dans [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i], Miller se montrait très critique envers le gouvernement Reagan (tant sur sa politique intérieure qu’extérieure) et la criminalité qui gangrenait les villes américaines. Dans [i]Batman : The Dark Knight Strikes Again[/i], Miller s’attaque désormais à la Présidence de George Bush Jr (qui était président au moment où Miller a écrit le récit, n’oublions pas que nous sommes en 2001) et dénonce l’asservissement des politiciens aux grandes multinationales (à travers Lex Luthor qui n’oublions pas est le PDG de Lexcorp, une vaste multinationale dans l’univers DC) mais aussi l’écart qui s’est creusé entre les plus riches et les plus pauvres. Evidemment, les attentats du 11 septembre 2001 sont également évoqués puisqu’ils ont eu lieu pendant que Frank Miller écrivait son récit. Dans la préface, qu’Urban a eu la bonne idée d’inclure, Frank Miller explique que cet évènement l’a bouleversé et l’a amené à modifier son récit et le ton de l’histoire, la rendant encore plus sarcastique, trash et violente.
Frank Miller semble donc vouloir livrer une histoire soignée, poussée, avec un vrai travail de fond. Néanmoins, il ne fait juste qu’essayer car sa fureur, sa hargne et sa colère sont tellement fortes et sont font tellement ressentir au cours du récit que c’est la seule chose qui en transparait. Si le premier chapitre est très bien construit (le meilleur des trois d’ailleurs), la suite de l’histoire part vite en n’importe quoi et quand on apprend que Miller a modifié son histoire à la suite des attentats du 11 septembre, on peut dire qu’il aurait mieux fait de s’abstenir et que ce triste évènement lui a quasiment fait péter un fusible (ce qui a fini par être démontré avec ses récents travaux notamment [i]Holly Terror[/i]). Car oui, voilà, plus on avance dans l’histoire et plus on a l’impression que Frank Miller donne ici sa propre psychanalyse, qu’il nous livre tout ce qu’il a sur le cœur et ceci au détriment du scénario qui est, avouons-le, très plat voire même inexistant à certains moments. En temps normal, je suis assez indulgent avec les auteurs qui essayent de nous faire passer un message car je pense que l’écriture est un moyen d’exposer ses idées (certes, cela dépend des idées mais je ne suis pas ici pour juger si les idées de Miller sont bonnes ou mauvaises). Malgré tout, Miller le fait de façon très maladroite et si dans [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i], son message était au service de l’histoire, ici c’est l’inverse et la lecture est vraiment indigeste lors de certains passages.
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[i][b]J’ai traqué des voyous et des bandits pendant que les vrais monstres prenaient le pouvoir en toute tranquillité ! / Batman.[/b][/i]
Frank Miller rompt également avec l’ambiance noire, sombre et psychotique de son premier récit pour instaurer ici une ambiance flashy, trash, violente et très fantasmagorique. Le personnage de Batman n’a plus rien du vieil homme torturé de [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i] et est devenu un révolutionnaire sadique qui prend du plaisir à torturer, à envoyer des jeunes au combat et même à tuer. L’importance des médias et de la population américaine, considérable dans le premier opus, est réduite à néant et il n’y a quasiment aucun personnages de la Batverse qui interviennent dans ce récit: pas de Catwoman, pas d’ennemis phares de la franchise, un Gordon réduit à une simple apparition et à une caractérisation déplorable…
Le seul véritable élément de la Batverse que l’on retrouve dans ce récit c’est [spoiler]Dick Grayson ! Or, ce dernier et sa relation avec Batman sont littéralement massacrés par Frank Miller[/spoiler]
Bref, on a vraiment du mal à se croire dans un récit sur Batman et surtout, on a du mal à réaliser que c’est Frank Miller qui a écrit cette chose ! Car oui, Frank Miller c’est quand même le type qui a révolutionné le Chevalier Noir en lui redonnant cette touche noire qui lui allait si bien. C’est lui qui a écrit les chefs d’œuvres que sont [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i] et [i]Batman : Year One[/i] mais ici, il se plante monumentalement et livre plus un récit sur l’univers DC que sur Batman.
[i][b]Que leur est-il arrivé ? Où sont-ils ? Où sont nos héros ? / Jimmy Olsen.[/b][/i]
Ainsi, de nombreux personnages apparaissent et les caméos et apparitions en tout genre ne cessent de s’enchaîner. On a le droit à de nombreux héros de la JLA mais aussi plusieurs vilains. Je ne conteste pas l’initiative bien au contraire mais là encore, Miller se plante royalement et offre une pitoyable caractérisation des personnages. L’accent est vraiment mis sur le vieillissement, le déclin des héros mais cela ne prend pas et on se croirait dans une mauvaise parodie de [i]Kingdom Come[/i] tellement cela part en vrille. Superman est plus pitoyable que jamais, Captain Marvel est à mille lieux de ce que l’on connait, Green Arrow est un vieux communiste aigri et Wonder-Woman est une brute épaisse fière de coucher avec Superman (avec cette dernière, Miller nous offre une belle vision de la femme en plus, quel homme…). Malgré tout, il y a certains moments sympa notamment avec Barry Allen, The Question, Atom ou encore Martian Manhunter qui ne sont pas massacrés.
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Malgré tout, tout n’est pas à jeter à la poubelle non plus ! Comme je l’ai dit auparavant, le premier chapitre est vraiment très bon et vaut largement [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i]. Le début du second est pas mal aussi et c’est à partir du milieu de ce chapitre que tout part en vrille et ceci à tous les niveaux (dessins, dialogues et scénario). Dans ces chapitres, nous retrouvons presque la noirceur du personnage, sa fureur, sa hargne, sa volonté et l’aspect décadence du monde est bien mis en avant. Les médias sont eux aussi utilisés à bon escient et on prend du plaisir à suivre les personnages que Miller avait créés à l’occasion de sa première histoire (Carrie Kelley en tête). De plus, certaines scènes dégagent quelque-chose : certaines sont intenses, d’autres sont poignantes et sur certaines, Miller arrive même à livrer de l’épique et des super-héros iconiques. Car oui, à l’origine, l’objectif de Miller (qu’il n’a jamais réellement atteint) était de montrer la renaissance des super-héros et d’offrir un hymne à leur gloire et aux valeurs qu’ils défendent.
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Il y a donc beaucoup de choses à dire sur [i]Batman : The Dark Knight Strikes Again[/i] et nul doute que Miller avait lui aussi beaucoup de choses à nous dire. Tellement de choses qu’il se perd dans son récit et la trame scénaristique est vraiment difficile à suivre. Beaucoup d’idées (dont certaines qui étaient intéressantes), sont amenées ici et là mais ne sont pas développées tandis que d’autres s’enchaînent de façon fantasmagoriques et incohérentes. La fin de l’histoire en elle-même est aussi assez décevante et ne fait que confirmer que Miller a perdu de sa superbe et en presque devenu gâteux.
Enfin, pour en terminer avec la critique de cette histoire, parlons des dessins. Et bien là aussi, c’est très controversé et beaucoup risquent de ne pas aimer, mais alors pas du tout. Là où [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i] était difficilement lisible à cause de la multitude de détails, de la multitude de cases et de la multitude de textes, cette suite est bien plus simpliste : les décors sont inexistants, les personnages sont très schématiques, au trait grossier et épais mais aussi avec des décors inexistants. Je ne dirais pas que les dessins sont moches mais plutôt qu’il est difficile d’adhérer aux choix artistiques de Miller. Selon moi, la fureur de Miller se ressent jusque dans ses dessins, des dessins grossiers, extrêmes qui font ressortir les grands défauts de ces personnages iconiques et ceci parfois de manière caricaturale. Prenons Lex Luthor représenté de manière obèse, n’est-ce pas là une caricature des grands PDG avides de pouvoirs… Evidemment, c'est assez rebutant à la lecture mais j’avoue qu’au fil des pages, je me suis fait à ce style si particulier. Le seul personnage qui me dérangeait était peut-être Batman qui a été aminci et j’aurais préféré que Miller le représente épais, comme il l’était dans [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i].
Par contre, ce qui n’aide pas du tout à apprécier les dessins, c’est l’immonde colorisation de Lynn Varley. C’est criard, c’est flashy et c’est horrible pour les yeux. Encore une fois, je pense que les couleurs criardes étaient voulues par Miller mais je pense que là, c’était vraiment une faute car si la colorisation avait été plus sobre (comme pour [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i]) alors nul doute que les dessins auraient pu être mieux appréciés.
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Néanmoins, l’édition d’Urban Comics contient également le DVD et le Blu-Ray du film animé [i]Batman : The Dark Knight Returns, Part 2[/i].
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Je rappelle que la première partie était sortie avec [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i] et que les deux films animés adaptent le célèbre récit de Miller. D’abord, le rapport qualité/quantité/prix est là puisque pour 28 €, vous avez le droit à une histoire complète (à la qualité discutable certes) réédité dans une prestigieuse édition mais également un DVD et un Blu-Ray. Un point fort donc de ce côté-là d’autant que le film animé est excellent.
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Visuellement, c’est parfait et du point de vue adaptation, il n’y a rien à redire car les scénaristes ont su trouver le juste milieu et se détacher du comics lorsqu’il le fallait mais sans en trahir l’esprit d’origine. Je n’en dirai pas plus car j’avais déjà écrit une critique de ce film animé et vous pouvez la lire en cliquant [url=http://www.mdcu-comics.fr/news-0010113-batman-review-batman-the-dark-knight-returns-p-2.html]ici[/url].
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[b]En conclusion, [i]Batman : The Dark Knight Strikes Again[/i] est une œuvre très controversée. Ceux qui pensaient retrouver le Miller de [i]Batman : The Dark Knight Returns[/i] seront forcément déçus car ce dernier change totalement de style, de ton et de direction dans ce second opus qui au final se révèle en être à mille lieux et même carrément indigne. Les choix scénaristiques et graphiques de Miller en déconcerterons plus d’uns mais une chose est sure, cette histoire ne vous laissera en rien indifférent et c’est pour cela que je vous conseille tout de même de la lire si vous en avez l’occasion. Car oui, Miller surprend ! Il ne le fait pas forcément de la meilleure des façons mais il surprend avec une œuvre où il se livre à cœur ouvert et avec une œuvre où il fait carrément tout le contraire de ce que l’on attendait. Malgré cela, l’auteur aurait pu nettement faire mieux et on est content qu’une suite ne soit jamais sortie.
A côté de cela, n’oublions pas quand même que l’édition d’Urban est de qualité et qu’elle propose également l’excellent, que dis-je le sublime film animé [i]Batman : The Dark Knight Returns, Part 2[/i].[/b]
[conclusion=2,5][/conclusion]
[onaime]- Le pack Comics + DVD + Blu-Ray d’Urban Comics.
- Le film animé est juste excellent.
- Un premier chapitre qui est vraiment très bon.
- Le retour des icônes DC.
- Certains passages sont tout de même intenses.[/onaime][onaimepas]- Le message politique et social de Miller ne plaira pas à tout le monde…
- La fureur de l’auteur qui prend le pas sur l’histoire.
- Une caractérisation pitoyable des personnages.
- On n’a pas l’impression de lire une histoire sur Batman.
- Les diverses faiblesses scénaristiques.
- Le style graphique de Miller qui risque de déplaire.
- L’immonde colorisation.[/onaimepas]
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