Conférence Chris Claremont au PopCon de Toulouse

Conférence Chris Claremont au PopCon de Toulouse

Pour sa toute première édition, l’événement geek PopCon, qui accueille en son sein le Festival Super-Héros, a décidé de frapper un grand coup en invitant des pointures du monde comic books. Parmi elles, l’immense Chris Claremont, la légende des légendes des scénaristes à qui on doit notamment les X-Men, Excalibur, Les Nouveaux Mutants et plein d’autres séries incroyables, est venu rendre visite au public toulousain. À cette occasion, le costaud Paul Renaud a organisé une conférence avec le maître afin d’en savoir plus sur cet écrivain de génie à l’humour ravageur…

Bonjour Chris, en guise de première question, nous aimerions savoir comment vous avez été amené à travailler chez Marvel ?

Ah ! La réponse risque d’être un peu longue ! (rires) Lorsque j’étais à l’université à la fin des années 1960, cette dernière avait fermé ses portes du 1er janvier au 1er mars pour permettre aux étudiants de se former et d’avoir une première expérience avec le monde du travail. De mon côté, j’adorais la politique ainsi que le théâtre et dans cette période un peu troublée par les manifestations durant le mandat de Nixon, trouver un job au sein de l’Administration ou bien dans un théâtre n’était pas vraiment la panacée. Du coup, je ne savais pas trop dans quel domaine chercher pour avoir ma première expérience professionnelle. Or, Al Jaffee, qui était un dessinateur chez Mad Magazine (il y travaille toujours maintenant à l’âge de 98 ans !), était très ami avec ma famille. J’ai fait appel à lui en pensant que ce serait génial de faire mes premières armes chez Mad. Hélas, mes parents n’ont pas voulu que j’intègre cette petite entreprise car le magazine avait la réputation de souiller l’esprit de la jeunesse (rires). Al m’a alors demandé si j’aimais les comic books car il avait un ami qui pouvait peut-être m’aider. Je lui ai répondu que ça pouvait effectivement m’intéresser. Dès le lendemain mon téléphone a sonné et la personne à l’autre bout du fil s’est présentée à moi comme ça :

- Hey, salut true believer, ici Stan Lee ! J’ai entendu dire que tu cherchais un job… ? Je t’avertis tout de suite, on est qu’une toute petite entreprise sans trop de moyens financiers et on ne peut pas se permettre de te payer très cher !

J’ai alors répondu que je devais trouver du travail dans le cadre de mon cursus universitaire et, de ce fait, je n’étais pas autorisé à demander un salaire…

- Tu es engagé !

Je précise que c’est une philosophie que Marvel continue d’appliquer encore aujourd’hui ! (rires). J’ai donc passé deux mois à travailler chez Marvel Comics en tant que touche-à-tout : je faisais le café, les photocopies, je répondais aux courriers des fans, je livrais des colis, j’en réceptionnais, je faisais des corrections de textes... Bref, j’étais un stagiaire qui faisait plein de choses différentes et je trouvais ça plutôt super ! Je dois même avouer que ces deux mois au sein de Marvel ont été les plus cool de tout mon cursus universitaire ! (rires)
À cette époque-là, Roy Thomas et Neal Adams travaillaient sur un comic book que j’adorais : les X-Men et dans lequel je m’occupais parfois de la correction des dialogues. Un jour, alors que Roy se creusait les méninges pour savoir comment terminer une histoire dans laquelle les X-Men étaient en bien mauvaise posture face aux Sentinelles, je lui ai proposé naïvement d’utiliser le soleil, puisque le rayonnement solaire peut être une source de mutations. Plus tard, j’ai vu Neal Adams dessiner une pleine page dans laquelle on voit les Sentinelles se diriger tout droit vers leur destruction en direction du soleil… Je pense donc que c’est de ma faute ! (rires)

Vous diriez donc que c’est votre début officieux sur la série X-Men ?

Oui ! Puis environ six ans plus tard, je bossais toujours chez Marvel quand Neal Adams et Dave Cockrum travaillaient ensemble sur X-Men Giant Size #1. Ils devaient trouver une issue au combat des X-Men contre Krakoa the Living Island (oui, à cette époque on pouvait se battre contre des îles géantes vivantes qui mangent des gens ! Je rappelle que c’est ma génération qui a tout fait pour qu’on légalise la marijuana, hein ? – rires). Vu qu’une île est tout simplement une montagne dont la partie supérieure sort de l’eau, j’ai proposé que les X-Men aillent sous l’eau pour découper la base de l’île et que la force centrifuge de la Terre ainsi que la loi de la gravitation fassent le reste…

Vous n’êtes pas crédité sur le X-Men Giant Size #1 pourtant vous y avez bel et bien participé…

Oui, oui, c’est bien ça… !

Officiellement, vous n’êtes pas le créateur de personnages comme Tornade ou Wolverine , mais c’est vous qui avez façonné leurs personnalités. Comment s’est passé ce processus créatif ?

En fait, mon processus créatif pour construire les personnages reste toujours le même. Je me pose les questions suivantes : qui sont-ils ? Que veulent-ils ? Vers où vont-ils ? Qu’est-ce qu’il les motive ? Il faut savoir qu’il y a une grosse différence entre l’écriture d’un roman et d’un comic book. En effet, ce dernier est un processus collaboratif. À ce titre, j’ai eu la chance de travailler avec Dave Cockrum et plein d’autres artistes sur les cinquante dernières années, ça a été très enrichissant et ça m’a permis de tirer le meilleur de moi-même au travers de mes scénarii.
En ce qui concerne les personnages, on s’est posé autour d’une table avec Dave pour bien les appréhender. De son côté, il avait déjà créé les designs de Nightcrawler et Tornade, il avait donc déjà une idée précise de leur motivation. Pour Wolverine, le personnage avait déjà été mis en place par Len Wein, on a donc cherché à faire en sorte de leur rendre encore plus intéressant. Dans le concept original développé par Len, Wolverine était un adolescent et son pouvoir était son facteur de guérison. Ses griffes faisaient simplement partie de ses gants, c’était juste une arme comme une autre. Dave Cockrum et moi-même avions une autre vision de ce personnage. D’ailleurs, dans le X-Men Giant Size #1, Dave avait déjà dessiné un Wolverine bien plus vieux que celui de Len en lui donnant un passé d’ancien gradé de l’armée du Canada. En ce qui concerne ses griffes, on s’est dit que ce n’était pas une bonne idée de les avoir dans des gants. En effet, si on y réfléchit bien, l’une des différences entre Spider-Man et Iron Man c’est que Peter Parker a ses propres pouvoirs d’araignée avec ou sans costume tandis qu’Iron Man n’est juste que l’armure de Tony Stark. N’importe qui peut la porter, en fin de compte. Du coup, on voulait que les pouvoirs de Logan soient plus visibles… Avant le X-Men #98, Dave Cockrum avait travaillé sur pas mal de sketches de Wolverine et il y en avait un dans lequel on voyait les griffes sortir de sa propre main en transperçant sa peau. J’ai trouvé ça vraiment très cool et on a décidé de garder cette idée propre au personnage de Logan...

Pourquoi avoir utilisé deux membres originels des X-Men – Cyclope dans un premier temps puis ensuite Jean Grey comme encadrants de la nouvelle équipe des X-Men ?

En fait, Cyclope n’a pas de vie en dehors des X-Men donc l’idée d’en faire le leader de la nouvelle équipe est venue tout naturellement. De plus, d’un point de vue éditorial, sa présence permettait aussi de faire le lien entre la première équipe des X-Men et la nouvelle. En ce qui concerne Jean Grey, Dave Cockrum et moi-même n’étions pas vraiment sûr de savoir comment utiliser ce personnage avec son look d’adolescente propre sur elle et trop ancrée dans les années 1960. On l’a donc mise de côté pendant quelques numéros le temps de réfléchir et de retravailler son design pour coller aux années 1970. De plus, le fait de l’intégrer dans les nouveaux X-Men aux côtés de l’autre personnage féminin Tornade, permettait d’avoir deux femmes dans l’équipe. C’était quelque chose de nouveau pour l’époque car jusqu’ici il n’y avait que des mecs et une seule fille dans toutes les équipes de super-héros… ce qui était une vraie connerie ! (rires)

À partir de quel moment, vous avez senti que la série prenait de l’ampleur et que l’engouement du public était bel et bien réel ?

En fait, il faut savoir que la série X-Men sous la houlette de Neal Adams et Roy Thomas avait connu un énorme succès. Mais à l’époque, la manière dont nous suivions les ventes et l’intérêt du public pour les comics était très primitive. Ainsi, on ne se rendait compte du niveau des ventes d’un comic book sorti en janvier qu’au mois de novembre ! C’est pourquoi, on ne s’est rendu compte du succès des numéros écrits et illustrés par Neal et Roy que beaucoup plus tard, à la fin de l’année… alors même que la série avait déjà été annulée et que Neal Adams avait été engagé par DC Comics !
Techniquement, la situation s’était améliorée lorsque la nouvelle série X-Men a commencé. Quand le X-Men Giant Size #1 a été publié, le succès a vite été au rendez-vous. Mais avant que le X-Men Giant Size #2 ne soit sorti Marvel Comics a décidé que ce format n’était pas viable et a opté pour un format classique bimestriel. De ce fait, les épisodes qui auraient dû être dans le X-Men Giant Size #2 ont été intégrés dans les X-Men #94 et X-Men #95. Puis, au fil des numéros, on s’est rendu compte un peu avant la sortie du X-Men #100 que la série marchait très bien auprès des lecteurs. On n’avait pas encore le même niveau de vente qu’à l’époque de Neal et Roy, mais la réaction du public était phénoménale lorsqu’on voyait le courrier arriver en masse !

Malheureusement, Dave Cockrum n’était pas un artiste très rapide et il fallait se battre tous les mois pour pouvoir boucler les numéros à temps. Ça a été une période très difficile. Du coup, c’est John Byrne qui a repris le flambeau dès le X-Men #108 alors même que Dave et moi avions posé les fondations de ce qu’allait être la série pendant les seize prochaines années...

Vous aviez déjà travaillé avec John Byrne par le passé sur la série Iron Fist. Comment est-il arrivé sur la série X-Men ?

En fait, John est arrivé sur les X-Men un peu de la même façon que moi lorsque Len Wein a quitté la série : il en a fait la demande expresse. Et vu que je savais comment il travaillait puisqu’on avait bossé ensemble sur Iron Fist #15, il a vite eu le job. Il avait une vision du personnage de Wolverine sans son masque un peu différente que celle de Dave. En effet, pour John, le Logan de tous les jours n’était qu’un Canadien ordinaire alors que Dave en avait une image beaucoup plus dramatique mais au final John Byrne a parfaitement appréhendé le personnage tel qu’il était vu par Dave Cockrum.

Chris, vous êtes connu pour planifier vos histoires très longtemps à l'avance. Est-ce que c’était un processus inédit pour l’époque ou est-ce que c’était quelque chose déjà ancré dans la façon de travailler de Marvel ?

Je ne sais pas si c’était ou non la façon de faire de Marvel, mais c’est comme ça que je travaille de mon côté. Pour moi, la vie est faite de nombreux sous-entendus et c’est comme ça que je conçois les histoires sur lesquelles je planche. Ainsi, on fait tous des choses dans notre propre vie et ce sont ces choses-là qui plantent les graines de ce qui va prendre effet des jours, des semaines voire même des années plus tard. C’est exactement pareil pour l’écriture : pour moi, il est naturel que toutes mes histoires ainsi que les personnages soient structurés de cette façon-là.
Bien sûr, c’est une façon de voir les choses un peu différente de ce que faisait Stan Lee, dans la mesure où, pour lui, chaque histoire devait avoir une fin à la fin du numéro. Il partait du principe que le lecteur qui ne connaissait pas une série pouvait comprendre n’importe quel épisode sans avoir lu les précédents. Il fallait donc introduire les personnages, le contexte puis l’histoire avec un début et une fin. Pour moi, le but du scénariste est d’écrire une histoire pour tous les lecteurs – a fortiori ceux qui connaissent déjà les personnages – en posant certes le contexte mais en faisant aussi évoluer les différents protagonistes au fil des épisodes. Aujourd’hui, il m’arrive de lire des histoires avec des personnages que j’ai moi-même créés mais que je ne comprends plus car les différents scénaristes qui se sont succédé n’ont pas beaucoup travaillé sur la longueur… C’est bien dommage. Mais pour en revenir à Stan Lee, il pensait que si une histoire était bonne, on pouvait en faire deux numéros ! (rires) En fait, avec Stan il était possible de foirer un numéro. Si c’était le cas, il fallait qu’on se rattrape pour le suivant. Mais si on ratait notre coup alors on était mis à la porte et remplacé par quelqu’un d’autre ! (rires) Du coup, je faisais en sorte d’écrire pour qu’il y ait bien une histoire par épisode comme le voulait Marvel, mais je plantais ici et là quelques petites graines pour pouvoir faire évoluer petit à petit les personnages et différentes petites intrigues...

En ce qui concerne Jean Grey et le Phoenix, comment arrive-t-on à créer l’une des plus formidables sagas dramatiques de l’histoire des comics ?

Je ne sais pas ! (rires) La création scénaristique est un processus organique qui peut être planifié sur une longueur plus ou moins longue, mais qui se doit d’être aussi assez souple pour pouvoir composer avec différents éléments extérieurs. Par exemple, il y a une série aux États-Unis qui s’appelle The Good Fight et dont un épisode était basé sur l’élection d’Hillary Clinton à la présidence… Eh bien, figurez-vous que les scénaristes ont dû le retravailler suite aux résultats des élections ! (rires)
Comme je l’ai dit, écrire un scénario et travailler sur le storytelling est quelque chose de très vivant et organique. Il faut être ouvert à toutes les sources d’inspiration. Plus on cherche à canaliser l’inspiration, moins l’histoire devient organique et au final, elle deviendra inintéressante…

À l’inverse d’autres scénaristes qui écrivent des personnages en fonction de leurs critères principaux, votre travail est de toujours faire des protagonistes en constante évolution. Jean Grey en est d’ailleurs un bon exemple…

C’est vrai… mais il faut savoir que j’ai dû me battre contre l’éditeur pour pouvoir faire évoluer mes personnages. Dès le début de mon run sur la série X-Men, j’avais d’ailleurs prévu de faire évoluer Magneto en héros pour au final prendre la place de Charles Xavier. J’ai toujours pensé que c’était un personnage aux multiples facettes plus intéressant que le Professeur Xavier. En effet, Erik a beaucoup de défauts, mais ses défauts sont magnifiques. Avec lui en tant que directeur de l’école des mutants, on a un personnage toujours en passe de franchir la ligne jaune pour arriver à ses fins. Ensuite, il y a Illyana Raspoutine. Elle, elle est vraiment méchante et en plus elle utilise la magie noire. Elle a envie d'être du côté des bons car son grand frère, Colossus, est un héros et sa meilleure amie c'est Kitty Pryde. Elle veut être digne de cette amitié et cherche à être sauvée d'elle-même. Ça donne une grande responsabilité à Magneto...
Je trouve que ces personnages sont très intéressants car ils se battent contre eux-mêmes pour devenir des héros mais il y a toujours un gros risque qu'ils chutent dans leurs vieux travers… En fait, j’ai l’impression qu'il y a un petit peu de Shakespeare dans le personnage de Magneto. Ce qui n'est pas le cas pour Charles, qui est un personnage beaucoup trop parfait et lisse. Malheureusement, Marvel Comics avait d'autres idées pour Magneto. C'est la vie (en français).

Chris, une autre facette de votre travail est d'avoir été avant-gardiste sur tout un tas de sujets comme par exemple le féminisme. Est-ce que ce sont des choses qui ont été difficiles à amener ?

Quand j'ai commencé à travailler pour Marvel, chaque équipe de super-héros avait une seule fille : il y avait Marvel Girl, Invisible Girl, The Wasp, etc. Et moi, je me suis battu contre ça. En effet, je me suis demandé pourquoi dans la série Fantastic Four la fille avait comme seul pouvoir… de disparaître ! Est-ce que c'était une métaphore ? Je me suis dit que j'allais casser ces codes-là car je pense que les personnages féminins sont beaucoup plus cool que les personnages masculins. Il était temps de le montrer !
D’un point de vue plus personnel, quand ma mère était jeune, elle voulait être pilote de chasse. Mais quand elle a voulu postuler dans l'armée de l'air britannique, elle a été recalée car les femmes ne pouvaient pas être des pilotes... Mettre en avant les femmes dans mes histoires était une façon pour moi de rétablir la balance ! Je pense sincèrement que les femmes sont l'égal des hommes et, à ce titre, elles doivent avoir plus de visibilité. En plus, les femmes représentent 51 % de la population mondiale. Donc si un éditeur veut vendre plus de comic books, il ne faut pas qu'il se mette à dos plus de la moitié de la Terre ! (rires)

Dans la série des X-Men, une des idées les plus audacieuses est d'avoir rendu le personnage de Storm encore plus cool et bad ass lorsqu'elle a perdu ses pouvoirs. Quelle a été la réaction des lecteurs ?

Leur réaction a été la même que celle de Kitty ! Ils n'aimaient pas trop ce qu’était devenu le personnage et sa crête, mais moi je trouvais ça cool (sans doute parce que je suis un vieux punk anglais - rires).

Vous avez travaillé avec de nombreux artistes comme Dave Cockrum, John Byrne, Paul Smith, Marc Silvestri, Jim Lee... Est-ce que vous pourriez décrire les collaborations que vous avez eues avec tous ces illustrateurs ?

Chaque artiste est unique et chaque artiste a un personnage favori. Par exemple, Dave adorait Nightcrawler. Il aimait le dessiner avec des épées dans chaque main et une tenue par sa queue. John lui, n'aimait pas Nightcrawler mais il adorait Wolverine alors même que Dave n'avait que peu d'intérêt pour le griffu... Avec John, Logan est devenu l'un des piliers de l'équipe des X-Men. John était tellement obnubilé par lui qu'il a fait en sorte de rendre le personnage vraiment borderline au fil du temps. On peut s’en rendre compte dans les dernières cases du X-Men #132, dans la scène des égouts où Wolverine taille en pièce les membres du Club des Damnés. Jim Shooter était vraiment en colère par cet épisode car il ne respectait pas vraiment le Comics Code ! Jim nous a donc ordonné de rattraper le coup lors de l'épisode suivant et de montrer que toutes les victimes n'étaient que blessées... mais on ne l'a jamais fait ! (rires)
Il y a aussi un autre épisode dans lequel Storm, Nightcrawler et Wolverine sont en Terre Sauvage à l'assaut d'un château truffé de gardes armés. À un moment donné, Logan dit à ses coéquipiers qu'il va s'occuper des gardes… Puis, dans la case suivante, on voit les regards horrifiés des deux autres héros. L'idée est qu'on voulait faire comprendre au lecteur que ce personnage-là a son propre code de conduite et qu’il ne respecte les règles que quand il le veut bien. Bien entendu, toutes les choses horribles qu'il fait sont hors case. C'est au lecteur d'utiliser sa propre imagination…

Est-ce que vous aviez une responsabilité dans le choix de l'illustrateur avec qui vous travailliez ?

Il est très important de savoir choisir un artiste. C'est comme pour la danse : on peut danser tout seul mais c'est mieux de danser avec un excellent partenaire. En général, les comics sont créés par une équipe créative qui est constituée d'un scénariste et d'un illustrateur. Idéalement, j'ai toujours cherché quelqu'un qui soit compatible avec moi mais c'est encore mieux si les forces de l’un arrivent à contrebalancer les forces de l'autre… Je dois avouer que j'ai été vraiment très chanceux de pouvoir travailler avec des artistes ultra doués, ça m'a permis de travailler sur des bonnes histoires qui ont eu un excellent rendu, notamment avec le talentueux Alan Davis.

Questions du public

D'où est venue l'idée de la création du personnage de X-23 ?

Euh... Alors, comment répondre à cette question ? Ce n'était pas moi ! (rires) [Le personnage a été créé par Craig Kyle et Christ Yost en 2003 – NDR] Je n'en ai vraiment aucune idée… tout ce que je sais c'est qu’Alan et moi on a seulement réalisé deux numéros - Uncanny X-Men #450 et Uncanny X-Men #451 - avec ce personnage de X-23. Et… moins on parlera de ça, mieux ça sera ! (rires)

Vous avez travaillé dans l’univers des comic books pendant de très longues années. Est-ce que la façon de travailler de maintenant est différente de celle d'avant ?

Oui. C'était bien plus marrant de travailler dans les années 1970 ! (rires) Maintenant, quand on travaille dans l'industrie des comics mainstream comme chez Marvel ou DC, il faut respecter de très nombreuses règles. Il y a beaucoup plus de personnages, beaucoup plus de complications et donc beaucoup plus de scénarii qui sont élaborés des années en avance. Il y a aujourd'hui de moins en moins de liberté pour la spontanéité et la créativité. Selon moi, tout est devenu bien trop propre dans la présentation... plus aseptisé. Il faut avoir une ligne de conduite stricte et bien s'en tenir aux règles du jeu. C’est triste.
Quand Stan Lee était encore aux commandes de Marvel il avait trois règles : la première c'était que le comics soit bon, la seconde c'était qu'il devait être réalisé dans les délais et la troisième c'était que l'équipe créative ne devait pas l’emmerder. Mis à part ça, les scénaristes et les artistes pouvaient faire ce qu'ils voulaient (ou presque) car Stan était trop occupé à développer Marvel. La façon de travailler était donc plus bordélique à l'époque, on faisait pas mal d'erreurs aussi mais en fin de compte on avait une grande liberté créative. Aujourd'hui, tout est sous contrôle. Dans un sens, c'est quelque chose de bien car tout est cadré, mais qu'est-ce que c'est ennuyeux !

Lors de votre longue carrière, vous avez travaillé sur de très nombreuses histoires. Si aujourd'hui on devait vous donner carte blanche pour bosser sur un scénario, lequel ce serait ?

À l'heure actuelle, je n'ai pas carte blanche quand je travaille... Mais si c'était le cas – et que Marvel était très riche – je créerais quelque chose de vraiment cool. En effet, il y a des histoires que j'adorerais faire mais c'est trop compliqués de mettre les choses en place de nos jours. L'année dernière par exemple, on m'a demandé de travailler sur un pitch. J'ai eu un retour très positif sur ce script, puis le projet a été abandonné pour une raison que j'ignore et personne n'a jugé bon de m'en faire part... C’est un peu le problème récurrent de l’industrie moderne du comic book.
J'ai beaucoup de choses sous le coude que j'aimerais présenter aux lecteurs mais, malheureusement, je dessine très mal. Il faudrait donc que je trouve un artiste qui ait envie de travailler avec moi ainsi qu'un éditeur qui voudrait nous payer avec un salaire décent et qui accepte aussi mes projets. Et ça, c'est très difficile à trouver de nos jours. S'il y a un éditeur avec de l'argent dans cette salle, qu'il me fasse signe ! (rires)

Quel est votre avis sur le procédé qu'ont certains scénaristes de donner les mêmes lettres aux initiales de leurs personnages comme Bruce Banner , Peter Parker, Susan Storm... ? Auriez-vous pu recourir à ce procédé ?

Des personnages avec les mêmes lettres dans les initiales ? Un peu comme Chris Claremont, quoi ! (rires) En fait, il faut savoir que c'est assez dur de trouver les noms des personnages quand on écrit. D'ailleurs à ce titre, j'ai réalisé il y a quelques années que le nom de Stark est l'anagramme de celui de Trask, le nom du personnage qui a créé les Sentinelles. Au final, je trouve que le nom de Tony Stark est cool, donc ça me va. En général, le scénariste essaye de faire de son mieux quand il travaille sur le nom des personnages en espérant que ça plaise au lecteur... ça répond à votre question ? C'était quoi déjà votre question ? (rires)

Quel est votre avis sur les adaptations cinématographiques des X-Men ?

Est-ce que vous, dans le public, vous avez aimé tous les films relatifs aux X-Men ? Est-ce que vous avez aimé The Last Stand ?!

Je suis sûr que vous avez détesté celui sur Apocalypse…

Quoi ?! Il y a eu un film sur le personnage Apocalypse ?! (rires) Je trouve que c'est toujours très "audacieux" de terminer une saga avec un film et puis de faire le suivant avec un saut dans le passé. Comment voulez-vous que le spectateur puisse vibrer lorsque les personnages sont en danger alors même qu'il sait déjà avec le film précédent qu'ils sont tous vivants ? Ça me dépasse... (rires)

Qu'est-ce que vous pensez des adaptations de Wolverine ?

Quelles adaptations ?! (rires) En ce qui concerne Logan, je pense que c'est dans ce film qu'on retrouve les meilleures performances de Hugh Jackman et Patrick Stewart. Mais en tant que fan, j'aurai quelques suggestions à faire. En effet, quand le méchant Logan rentre dans la chambre de Charles Xavier et qu'il sort ses griffes pour le frapper, moi j'aurais fait une sorte de freeze pour arrêter son geste, comme si quelque chose le retenait. Ensuite, Charles aurait ouvert les yeux en disant quelque chose comme "mec, ce n'est pas aussi simple de m'avoir" puis, petit à petit, il aurait repoussé le bras de Logan...
En même temps, j’aurais aussi corrigé la scène qui a fait que ma femme est sortie de la salle de cinéma : tous les membres de la famille seraient vivants et Charles leur aurait dit par télépathie de fuir sans se retourner. Logan serait revenu courant vers la maison puis il y aurait eu un effet sur l'écran : c'est le moment où Charles perd le contrôle et se fait tuer par le méchant Logan. Le Professeur Xavier serait en train de mourir en tant que héros et non pas en tant que victime. Logan se sentirait coupable et triste mais il saurait que Charles était parti comme il l'avait souhaité...
De même, j'aurais fait un petit ajustement à la fin du film : les enfants se seraient enfuis au Canada. On verrait une tombe. Puis des pas qui s'approcheraient, le sol commencerait à trembler et une main sortirait de la terre. Une autre main arriverait sur le côté de l'écran pour la saisir. La caméra reviendrait doucement en arrière, puis Logan sortirait de sous la terre. La caméra s'éloignerait de plus en plus et on s'apercevrait que c'est un Logan jeune qui sort de terre. Il serait superbe. On verrait enfin qui est la personne qui lui tient la main : c'est Famke Janssen. Elle regarderait Logan, Logan regarderait Jane et ils s'embrasseraient, mettant ainsi  fin à neuf films d'attente ! Ensuite, on les verrait marcher main dans la main vers le soleil couchant... sauf que leurs ombres pointent dans une autre direction. Quelque chose ne colle pas. La caméra s'envolerait et on réaliserait que la lumière vers laquelle ils se dirigent ne serait pas le soleil mais le Phoenix ! Alors qu'ils se rapprocheraient, le Phoenix les enlacerait de ses ailes et les embraserait. L'écran deviendrait blanc. Voilà. C'est fini.

Un grand merci à Paul Renaud ainsi qu’à toute l’équipe du PopCon

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