Interview de l'acteur Jon Bernthal et du scénariste Steve Lightfoot

Interview de l'acteur Jon Bernthal et du scénariste Steve Lightfoot

Pour la promotion de la série Marvel's Punisher , MDCU a eu l'occasion de rencontrer lors d'une table ronde, l'acteur Jon Bernthal, qui incarne Frank Castle / Punisher et le showrunner de la série Steve Lightfoot. Ci-dessous, la restranscription écrite de l'interview.

 

Il y a le sentiment que vous aimiez plus ce personnage que les autres que vous avez déjà joué. Pourquoi aimez-vous autant le Punisher  ?

Jon Bernthal : Ce personnage est très important pour moi. Vous savez je suis un père et ma famille est l'une des choses les plus précieuses à mes yeux et l'idée que quelqu'un ou quelque chose puisse me les enlever ça me fait vraiment peur, ça me paralyse.
Je pense qu'on a tous un peu de Frank Castle en nous et je pense que toutes les personnes qui dans leur vie ont des choses plus importantes à leurs yeux que eux-mêmes comprennent bien le sentiment de Frank. J'ai de l'empathie pour ce personnage et surtout il compte beaucoup pour moi.

Nous voyons Frank Castle de plus en plus humain dans cette saison. Pensez-vous que cette saison est pour lui le voyage pour regagner son humanité ?

Steve Lightfoot : Oui et si c'est que vous ressentez c'est parfait ! Vous savez il commence la série avec l'idée que ce qui est arrivé à sa famille est de sa faute. Bien sûr, c'est pour regagner son humanité mais c'est aussi une manière pour lui de se pardonner pour sa part de responsabilité dans la disparition de sa famille. Il doit admettre que les méchants ont leur part de responsabilité ainsi que lui. C'est le premier pas qu'il doit effectuer pour pouvoir tourner la page...

Par rapport aux 4 précédentes séries Marvel par Netflix, on peut voir que celle-ci exprime visuellement un univers plus "normal" et moins héroïque. D'où vient cette volonté de banaliser l'univers visuel dans lequel évolue le personnage ?

Steve Lightfoot :  Vous savez, je pense que la forme découle du fond. On a d'abord commencé par écrire le personnage, son histoire et on a ensuite réfléchi à la meilleure manière de la mettre en scène. Etant un personnage sans super-pouvoir nous voulions l'éloigner de Manhattan et de ses beaux quartiers. Frank est différent des autres personnages, c'est un fugitif. Le monde croit qu'il est mort et le mettre à l'écart de la ville est une manière de montrer la rupture entre lui et le reste du monde. (Il est sur le port de Manhattan comme s'il était aux portes d'un monde auquel il n'appartient plus.)

Vous dites qu'il n'a pas de super-pouvoir mais il semble tout de même immortel...

Steve Lightfoot : Oui, mais vous savez il a quand même frôlé la mort plusieurs fois. Les balles ne rebondissent pas sur lui. Disons plutôt que d'une part c'est un vétéran et d'autre part il n'a pas peur de la mort. Tandis que ses ennemis eux si et ça lui donne un avantage.

Avez-vous rencontré des vétérans afin de construire votre personnage et son histoire ?

Jon Bernthal : C'était un honneur de jouer un personnage qui résonne autant avec la communauté militaire. C'est pour ça que l’on n’a rien voulu laisser au hasard avec Steve. Tous les soldats sont différents et nous ne voulions pas faire une généralité mais quelque chose de très spécifique avec le personnage.
Nous avons eu la chance de rencontrer des soldats de la 2ème Guerre mondiale, d'autres qui avaient fait le Vietnam, l'Afghanistan ou l'Irak. D'ailleurs je les remercie de m'avoir laisser les côtoyer assez longtemps pour comprendre leur mentalité ainsi que l'esprit de camaraderie entre soldats. Il n'y a pas deux histoires pareilles. Il n'y a pas deux soldats pareils.

Quelle partie de la série avez-vous préféré, la partie militaire ou la partie "buddy movie" avec Micro ?

Jon Bernthal : Je ne sais pas vraiment. Je pense que Steve a vraiment pris plaisir à sortir Frank de sa zone de confort et donc de m'en sortir. Il y a des moments sur le tournage où je me demandais "mais qu'est-ce que je fous là à avoir cette conversation". Et c'est exactement la manière dont Frank devait se sentir.
Vous savez, Frank ne cherche pas à interagir avec les autres, mais au final il reste un humain et à besoin d'exister socialement. Et bien qu'il ait bâti un mur entre lui et le reste du monde, il est impossible qu'il reste enfermé. Il sait qu'il va bien y avoir un moment où son mur va se fissurer. Et un rayon passera, puis un autre et au final il va commencer à tisser des liens et rencontrer des personnes à qui il va tenir. Jouer sur cette émotion de jeu était très intéressant pour moi.

A la première apparition de Russo, on ne sait pas comment il va évoluer et qui il va être. En même temps tout nous disait qu'il allait être le méchant. Comment avez-vous dirigé Ben Barnes pour qu'il nous fasse ressentir ça ?

Steve Lightfoot : Bill Russo est un personnage qui a été souvent représenté dans les comics et selon qui l'écrivait, le personnage n'a pas arrêté de changer. Dès le départ nous avions cette "obligation" de ne pas dénaturer le personnage, mais nous avons repris son histoire depuis le début afin de le comprendre et d'écrire notre version : une version qui servirait l'histoire.
Tout a commencé avec l'écriture du personnage. Je ne voulais pas qu'il soit juste un méchant mais vraiment qu'il soit traité comme s'il pouvait être le héros. Et en vérité c'est ça qui ressort : contrairement à d'autres vilains, nous avons écrit le personnage de Russo comme le héros de sa propre histoire. C'est d'ailleurs ce que nous avons tenté de faire avec tous les personnages. Si vous demandiez à chaque personnage il vous répondrait qu'il fait juste ce qui lui semble être le plus juste et c'est comme ça qu'a été dirigé Ben Barnes. D'où le fait que son jeu ne nous laisse pas deviner directement qu'il est le méchant.

Cette saison est très violente et très sombre. Dans ce genre de série comment arrivez-vous à vous fixer une limite à ne pas dépasser. Avez-vous des limites ?

Steve Lightfoot : Le ton avait déjà été donné dans la saison 2 de Daredevil et nous l'avons juste suivi au final. C'est ça qui nous a fixé les limites. Que ce soit dans une scène d'action, de violence ou de combat, ça reste une scène qui au final revient à une interaction entre deux personnages. On dose la violence en fonction de ce qu'on veut faire dire à la scène et de la dose d'émotion que l'on veut donner ! C'est ça qui nous guide au final.
Quand je vois une scène d'action où un personnage prends un coup en pleine face et n'a aucune marque je trouve qu'on rate l'essentiel de la scène et qu'on donne une fausse version d'un évènement. A chaque fois que Frank va se battre, il en ressort avec des blessures et ça signifie que ça lui coûte de se battre et qu'à chaque combat, émotionnellement, Frank perd une partie de soi en plus.

Jon Bernthal : Je suis assez d'accord avec ça. Je pense qu'il ne faut pas qu'on mette des limites juste pour en mettre. C'est une série violente et très sombre et le spectateur est conscient de ça.
Nous sommes quasiment sur un format d'un film de 30 heures sur Netflix et nous avons la permission et surtout la liberté de faire ce qu'on veut, donc je pense que ça ne sert à rien de se fixer des limites. Le but au contraire, c'est de les repousser encore plus loin à chaque scène. Quitte à ce que le spectateur ne soit pas d'accord avec le personnage et qu'il ne l'aime plus, plutôt que de justifier à chaque scène pourquoi autant de violence.
C'est important que le spectateur doute de Frank car lui-même à des doutes sur lui et c'est ce qui le rend si intéressant. Ce n'est pas juste le méchant héros, c'est bien plus. Et c'est intéressant à la fin, après avoir perdu le spectateur, de lui fournir l'explication, pas comme une excuse mais pour qu'il comprenne pourquoi il fait ce qu'il fait.
Cette explication, Frank se la donne à lui-même aussi pour comprendre ses actes et c'est ça qui est intéressant. Le spectateur cesse d'apprécier Frank en même temps que Frank lui-même, et le retrouve quand lui se retrouve.

Au début Frank veut sa revanche par le meurtre. Finalement quand il a enfin l'occasion de se venger, il le laisse vivre. C'est un immense progrès pour lui de se venger tout en laissant vivre.

Jon Bernthal : C'est une manière de voir les choses... mais je pense plutôt que Frank cherche à lui faire subir ce qu'il y aurait de plus douloureux pour lui. Il inflige la plus grosse souffrance possible à Bill et ensuite le laisse vivre pour qu'il comprenne comment lui à du vivre et ce que ça peut faire de vivre comme ça.

Avez-vous lu les comics et en avez-vous un préféré ?

Steve Lightfoot : J'adore Punisher Max de Garth Ennis mais il y en a eu tant d'autres et beaucoup de très bons !

Je trouve que la série parle très discrètement du problème de régulation des armes à feu aux USA et de tout ce que cela englobe. Est-ce que vous vouliez que l'audience fasse un choix ?

Steve Lightfoot : Je suis très content que vous ayez remarqué ça car c'était le but en effet, d’amener les gens à réfléchir sur la question. Mais non nous ne voulons pas donner notre avis sur la question. Le but de la fiction c'est justement d'amener les gens à réfléchir et à parler entre eux d'un sujet aussi important que celui-ci mais sûrement pas de leur indiquer la marche à suivre. Le but est plutôt de poser une question que d'y répondre. 

Comme Garth Ennis, est-ce une volonté d'éviter de faire partie du MCU ?

Steve Lightfoot : Quand je suis arrivé sur le projet on m'a briefé et le but de cette saison c'était vraiment de raconter l'histoire de Frank, de le laisser dans son monde et non pas de l'intégrer particulièrement au MCU.

Par rapport à la bataille finale où Frank à enfin sa vengeance, comment faites-vous pour vous mettre dans un tel état d'esprit. Comment rester dans cette humeur de jeu aussi dramatique ?

Jon Bernthal : Pendant le tournage, il y a des moments où je sais que je peux aller prendre un sandwich avec Micro ou que je peux rire avec l'équipe. Mais il y a des moments où il faut que je reste seul, il faut que je me mette dans l'humeur. Et cette scène fait partie de celles où l'on se prépare seul.
Après il faut dire que j'ai la chance d'incarner un personnage dans une série extrêmement bien écrite et avec un casting fantastique donc c'est toujours plus facile de rentrer dans le jeu pour des scènes aussi cruciales. On sait tous pourquoi on est là, on ne fait pas une sitcom, une comédie musicale, tout le monde est bien conscient de la noirceur et la violence qui entoure la série.

Karen Page n'était pas prévue pour cette saison. Pourquoi avez-vous décidé de la prendre ?

Steve Lightfoot : Ce n'est pas qu'elle n'était pas prévue c'est juste que Marvel ne m'as pas dit : "fais une saison avec Karen Page". Ils m'ont juste dit de raconter l'histoire de Frank.
Dans la saison 2 de Daredevil j'ai trouvé la relation entre Karen et Frank tellement forte que je m'en suis servie pour raconter l'histoire de Frank. Vous savez au début il n'a que deux amis au monde qui le savent encore vivant, c'est Karen et Curtis. Et puis Deborah (Karen Page) - il donne le nom de l'actrice mais je ne l'ai pas - Ndr - et John fonctionnent parfaitement bien en duo d'acteurs donc ça m'a semblé très logique de mettre Karen dans la série et ça aurait même été dommage de ne pas la retrouver.

Parlons de musique. Étais-ce votre idée Jon, votre apport au personnage, de jouer de la guitare dans la série où ça vient de Steve ?

Jon Bernthal : Je n'avais jamais joué de guitare avant la série et c'est Steve qui a voulu ajouter ça. Je crois que ça vient de ces dialogues avec les militaires qui avaient leurs guitares avec eux tout le temps...

Steve Lightfoot : Oui, j'avais des amis qui prenaient toujours leur guitare avec tout leur équipement quand ils étaient déployés.  C'était aussi une manière très forte d'évoquer son amour pour sa fille sans utiliser de dialogue.
Un père qui apprend à sa fille à jouer de la guitare ça rapproche beaucoup. Maintenant que Frank n'as plus personne à qui parler, il joue pour se rappeler sa famille. C’est une manière très simple et efficace d'humaniser le personnage. Enfin, Jon a adoré apprendre à en jouer donc c'était parfait.

Est-il vrai que vous avez vécu en Russie pendant longtemps ?

Jon Bernthal : Plus maintenant mais j'ai commencé ma formation de comédien à Moscou. En réalité, j'ai commencé avant Moscou avec un merveilleuse femme qui m'as appris à aimer jouer. C'est elle qui a fait qu'aujourd'hui je suis un artiste, que j'ai une carrière, une famille. Je lui dois tout.
C'est grâce à elle que j'ai découvert mon amour pour jouer la comédie. Je lui ai dit que je voulais en faire mon métier. C'est là qu'elle m'a dit d'essayer d'entrer dans l'école de comédie de Moscou qu'elle m'a décrite comme la meilleure du monde et je la remercie. Je remercie tous mes professeurs de l'école de Moscou car c'est grâce à eux si j'en suis là aujourd'hui. Ça a vraiment été une bonne chose d’être dans ce pays à ce moment-là pour moi.

Merci à Luca Bonnefille pour la grosse grosse aide !

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  • JeReMuse
    JeReMuse

    il y a 6 ans

    La meilleure série Marvel/Netflix! Vivement la saison 2!

  • Jeff
    Jeff Staff MDCU

    il y a 6 ans

    Interview très intéressante !

  • mmat1986
    mmat1986

    il y a 6 ans

    Terrible cette interview et je le redit Jon Bernthal quoi qu'en on pensé certain suite à son passage dans Walking Dead pour moi c'est vraiment un acteur à suivre, jusqu'à présent il ne m'a déçu dans aucun de ses rôles (par contre tous n'ont malheureusement pas rencontré le public qu'il aurait mérité "Mob City"...) mais en même temps tout ça l'a amené au rôle de Frank et il est énorme dans le rôle (déjà dans Daredevil) la série est avec Dardevile l'une des petites pétites des séries Marvel par NetFlix s'en est même à se demander si la volonté d'avoir fait the defenders n'était pas le plus mauvais choix de la chaine