Une ville crasseuse… Des prédateurs en embuscade lorsqu’apparaît une jeune fille sublime, émergeant nue d’un tunnel de métro désaffecté… Greg Rucka et Toni Fejzula nous entraînent dans un récit fantastique et horrifique, hypnotique à souhait…

Veil n’a aucun souvenir. Elle ne sait ni qui elle est, ni d’où elle vient. Elle émerge en pleine ville, captant immédiatement le regard des hommes. Elle se met alors en quête de son passé, de qui elle est – ou plutôt de ce qu’elle est vraiment –, sans savoir à qui elle peut faire confiance. Est-elle un simple objet de désir que les prédateurs convoitent, ou une force bien plus terrifiante encore ?

Pas d'avis pour le moment.

Alors qu’aujourd’hui, la France est inondée sous les traductions de comics, on découvre toujours de nouvelles choses arriver dans la langue de Molière. Sorti un peu de nulle part, Veil est un album assez atypique. Peut-être que Delcourt s’est décidé à le publier principalement grâce à sa tête d’affiche : Greg Rucka. Pourtant, assez étonnamment, ce n’est peut-être pas lui la star de ce récit complet.

Greg Rucka est un scénariste américain qui s’est en partie spécialisé dans le polar. Il a pas mal travaillé chez DC, sur Gotham Central, Action Comics, Detective Comics… mais a aussi créé ses propres séries comme Queen & Country ou Stumptown par exemple. Aujourd’hui, sa série phare est Lazarus publiée chez Glénat en France (la critique du tome 4 arrive bientôt d’ailleurs). Pourtant, ce n’est pas son seul travail, puisqu’en parallèle il a écrit Veil pour l’éditeur américain Dark Horse, et qui arrive chez nous grâce à Delcourt. Alors forcément, il y a une certaine attente derrière cette histoire pour ceux qui connaissent le scénariste. Et ça commence plutôt très bien. Une femme se réveille nue dans un tunnel de métro entourée de rats. Ses paroles sont du charabia. En sortant dans la rue dans un quartier qui semble plutôt mal famé, les hommes vont être attirés par elle.

Cette femme, c’est Veil, et elle va être aidée par un homme moins lubrique que les autres nommé Dante. Beaucoup de mystères entourent Veil, et ça ne s’arrange pas lorsqu’elle va forcer des hommes à s’entretuer par la pensée. Le début est très prenant, l’ambiance est vite posée et on se pose beaucoup de questions. L’histoire va virer par moment au très violent, et on va découvrir un autre personnage, un méchant sorcier. Rucka s’essaie ici à un genre plutôt inédit pour lui, c’est-à-dire le fantastique, avec une pointe d’horreur. Malheureusement, plus on en apprend sur Veil, plus on vire dans les clichés. C’est assez dommage. Le déroulement d’une grande partie de l’histoire est facilement prévisible et on ne s’étonne pas beaucoup des situations. Il y a cependant quelques idées sympas, et si on croise des clichés de situation et de personnages, les deux principaux protagonistes ont la force d’être loin du cliché qu’ils auraient pu être.

Pourtant, comme je le laissais entendre, ce n’est pas Rucka la star de cet album, mais le dessinateur, Toni Fejzula. Il s’agit d’un artiste serbe plutôt méconnu, mais qui a un certain talent. Son style ici est assez incroyable. Pour se donner une idée assez précise de l’intérieur de l’album, un coup d’œil à la couverture permet d’en avoir un aperçu. Il lorgne vers le cubisme avec des ombres en formes géométrique disséminées sur ses planches, tels des vitraux dessinés. D’ailleurs, on se demande comment il a obtenu ce rendu. Heureusement, les bonus bien fournis en croquis permettent d’en savoir plus. Un style original ne fait cependant pas tout, surtout dans une bande dessinée. Mais ce qui est fort, c’est que son dessin est aussi dynamique, n’hésitant pas à jouer avec la perspective, et à déformer ses personnages, comme le faisaient les expressionnistes.

Autre élément important du dessin, et très réussi, les couleurs sont nombreuses sans être flashy. Là encore, ça fait vraiment penser à des vitraux. Seulement, on raconte ici une histoire plutôt crade, il y a des passages assez gores. Et les dessins collent parfaitement à l’ambiance, donnant une image de bad trip halluciné et psychédélique sur les bords. Bref, si le scénario n’est pas fou, c’est surtout pour ses dessins que cet album mérite votre attention. L’histoire finit d’ailleurs sur une note très ouverte, qui pourrait laisser imaginer une suite. Pourtant, il n’y rien depuis 2014 aux Etats-Unis. En conclusion, feuilletez l’album chez votre libraire habituel, vous saurez rapidement si c’est un achat pour vous ou non.

En Résumé

 

LES POINTS FORTS

Le style du dessin
Les deux protagonistes

LES POINTS FAIBLES

Le scénario téléphoné

 

3.5

Très beau

Conclusion

Un récit complet qui vaut surtout pour ses dessins. Une expérience à tenter.