Emma a le cœur brisé. Littéralement. Désespérée à la suite de sa rupture avec l’Homme Sans Nom, elle a souhaité que son cœur disparaisse... et son vœu a été exaucé ! Privée de cet organe, la tristesse s’évanouit, mais les autres émotions aussi. Et Emma se rend vite compte que le vide est pire que le chagrin : elle va devoir récupérer les sept pièces de son cœur, disséminées aux quatre coins du pays. Son voyage la forcera à se confronter à sa propre histoire, et la mènera face à l’Homme Sans Nom lui-même...
Avec Heart in a box, Kelly Thompson et Meredith McClaren livrent une histoire subtile chargée d’émotion et d’empathie qui se dévore d’une traite. Un ouvrage frais, audacieux et intensément sincère qui annonce l’arrivée de deux talents en puissance.

Pas d'avis pour le moment.

Il y a quelques mois sortait chez Glénat Comics un graphic novel pas comme les autres, Heart In A Box, de Kelly Thompson et Meredith McLaren. Si vous êtes passés à côté de cette petite pépite, c'est le moment de corriger le tir et de vous laisser convaincre.

 

Avoir le « cœur brisé », nous avons tous connu cela, d'une manière et d'une autre, ce sentiment dévastateur retranscrit à la perfection par cette drôle d'expression figurée. Mais si elle n'était pas si figurée que cela ? Et si notre cœur volait vraiment en éclats à chaque grosse déception sentimentale ? C'est cette idée à laquelle s'intéressent Kelly Thompson et Meredith McLaren dans ce graphic novel, aborder cette image du cœur brisé dans sa forme la plus littérale possible. Elles nous servent alors un récit plein d'émotion, axé autour d'une trame relationnel et identitaire, plongeant volontiers dans le fantastique et l'artistique. Un cocktail original et détonant, qui ne laissera peut-être pas votre cœur intact.

 

 

Heart In A Box suit le personnage d'Emma, en pleine phase dépressive après une rupture amoureuse, qui va faire un mauvais choix et se retrouver à courir à travers tout le pays pour retrouver les morceaux de son cœur brisé. Une sorte de voyage initiatique, qui va la changer et l'aider à mettre les choses en perspective, et dont le but premier sera finalement même sans importance, pour au bout du compte pouvoir aller de l'avant et passer à autre chose. Un peu à l'image de Norah Jones dans « My Blueberry Nights », pour qui un roadtrip à travers les Etats-unis après une rupture et les confrontations avec différentes situations et personnes, lui permet de revenir à son point de départ et d'ouvrir à nouveau son cœur. Mais au-delà d'une fresque humaine, les auteurs ont le champ libre et tellement de situations différentes à imaginer qu'elles se lâchent totalement et nous font passer par toutes les émotions et tous les genre, n'épargnant jamais le personnage d'Emma. Il y a de violence et du meurtre (et ce dès les premières pages pour donner le ton !), de la tricherie, de la compassion, des mensonges, de la tromperie, de l'amour, de l'amitié et j'en passe ! C'est une histoire très colorée, dans tous les sens du terme. Et si certaines histoires, certains thèmes, nous toucheront plus que d'autres, tout fonctionne dans l'ensemble et chaque élément amène une pièce différent du puzzle et explore d'autres aspects. On a presque l'impression d'assister à une histoire épisodique mais dans un ensemble très cohérent et concis. Et ce qui est intéressant est que le personnage principal passe par la majorité de ces états, en faisant ainsi un personnage complexe et très intéressant à développé mais surtout, un personnage qui est aussi bourré de défauts, qui n'est pas du tout blanc comme neige et qui va devoir faire des choses pas très cool pour arriver à ses fins. Se racheter, trouver le salut et la paix intérieure, c'est une chose, mais ce n'est jamais simple ni gratuit.

 

Mais que l'on ne s'y trompe pas, sous ses airs de « drama » et de récit qui touche avant tout la corde sensible, Thompson et McLaren réussissent à injecter beaucoup d'humour et de légèreté à leur graphic novel, à tel point que beaucoup de situations qui devraient être assez lourdes sont finalement prises au second degré et passent parfaitement bien dans la dynamique de l'ensemble. Emma est déjà la première ambassadrice de ce second degré puisqu'elle détient une personnalité très sarcastique, qui vire parfois vers le cynisme, et l'on se régale de ses dialogues tout du long. Les autres personnages qui peuplent cette histoire ne sont pas en reste, en commençant par Bob, dont les joutes verbales avec notre Emma rythment l'intrigue. La folie ambiante, créée par ce concept fantastique et métaphorique très original et toutes les situations assez dingues qu'il engendre, aide aussi à se détacher un peu de l'histoire et à finalement la prendre avec un certain humour, même si certains moments très bien écrits et mis en scène font forcément mouche et ne peuvent nous laisser indifférent. L'enchainement de tous ces éléments, situations, thèmes, émotions font que le rythme est très soutenu et dynamique, rendant la lecture très absorbante, ne soyez pas surpris si vous ne réussissez pas à vous arrêter avant la dernière page.

Le concept qui nous est proposé dans ce graphic novel et tellement original et intéressant que paradoxalement, c'est aussi ce qui sa faiblesse, dans le sens où il n'est pas suffisamment développé. Si l'histoire est belle et bien réalisée, on ne peut s'empêcher de ressentir un peu de frustration à la fin de notre lecture, frustration de ne pas avoir pu aller au bout de ce concept fantastique du cœur brisé, de son fonctionnement et de toutes ses possibilités. Il y a même finalement assez peu d'explications autour de celui-ci, mais pour le coup font partie de l'aspect mystique et métaphorique que dégage le récit.  Une suite pour se faire ne serait pour autant pas la bienvenue, la fin est bonne, bien qu'elle soit assez prévisible, et offre un vrai sentiment de "tourner la page".

 

J'ai régulièrement cité les deux auteurs ensemble dans cet chronique, une obligation tellement ils apparaissent indissociable dans la création et la réalisation de cet œuvre. Les dessins de Meredith McLaren, assez caricaturaux, voir grossiers par moments, peuvent paraitre assez négligés au premier abord donnent une vraie puissance émotionnelle rare au scénario de Kelly Thompson. On ne s'attarde pas sur les détails, on ne veut pas quelque chose de réaliste et travaillé, les dessins visent surtout à toucher et à faire passer les émotions et ils le font rudement bien. La meilleure preuve en est que les parties les plus travaillés des dessins et surtout les plus prépondérantes s'avèrent être les yeux, ce n'est pas pour rien, il s'agit bien de ce que l'on appelle le miroir sur l'âme. Et forcément les expressions faciales de tous les personnages, Emma en tête, y gagnent en puissance. Ces dessins, également assez abstraits, collent parfaitement à l'intrigue et au concept du livre, qui sont de nature fantastiques, voir presque magiques, et donc forcément un peu abstraits, difficilement à cerner et encore moins à mettre en image. C'est pourtant ce que McLaren fait à merveille, notamment avec les superbes fresques lorsqu'Emma perd ou récupère des morceaux de son cœur. Les couleurs sont aussi très adaptées et mettent en lumière toutes les émotions que dégagent les pages, plus ou moins unies selon les émotions et sentiments ressentis par les personnages et changeant totalement de tons selon ces situations. On a le sentiment d'être imprégné de ces couleurs et de l'ambiance qu'elles créent.

 

En Résumé

 

LES POINTS FORTS

- Le concept original
- La justesse du récit
- L'humour et le second degré
- Les personnages
- L'ambiance et les dessins

LES POINTS FAIBLES

- Un idée qui méritait d'être plus explorée

 

4.5

Superbe !

{C}

Conclusion

Heart In A Box est un petit bijou d'originalité et de sincérité, Kelly Thompson et Meredith McLaren associent leurs talents en parfaite harmonie et signent une œuvre drôle et touchante, naviguant entre les genres et les émotions, servant une jolie fable humaine sur fond de fantastique. Un récit sombre et décalé, triste et plein d'espoir, une œuvre d'art qui fait exploser au grand jour le talent de ses auteurs.